Charles-Henri Favrod (Journaliste, écrivain, historien)

  • français
  • 1999-11-16
  • Dauer: 00:49:22

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Beschreibung

Né à Montreux en 1927, Charles-Henri Favrod évoque tout d'abord la ville de son enfance. La guerre, la maladie, puis les études à Lausanne forgent sa personnalité; il découvre l'Histoire et l'image qui la véhicule, deux axes qui ne cesseront d'orienter sa vie. Après le classique séjour à Paris et un tour de Méditerranée, il part pour l'Orient comme correspondant de la "Gazette de Lausanne" pendant la guerre d'Indochine. Il joue un rôle non négligeable dans les négociations qui aboutiront aux accords d'Evian. Puis c'est l'aventure des Editions Rencontre avec Pierre de Muralt. C'est enfin la création du Musée pour la photographie de l'Elysée, qui dit tout l'amour que Charles-Henri Favrod porte à la photo, énigme, objet constamment stupéfiant pour l'homme.

00:00:00 – 00:00:11 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Charles-Henri Favrod, journaliste, écrivain et historien, et tourné à Sait-Prex le 16 novembre 1999. L'interlocuteur est Patrick Ferla.
00:00:11 – 00:00:35 (Séquence 1) : Charles-Henri Favrod montre sa maison du XIIIe siècle datant de 1234. Dans cette maison, il a toujours été très heureux avec sa femme.
00:00:36 – 00:00:46 (Séquence 2) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Charles-Henri Favrod, journaliste, écrivain et historien, et tourné à Sait-Prex le 16 novembre 1999. L'interlocuteur est Patrick Ferla.
00:00:48 – 00:01:39 (Séquence 3) : Charles-Henri Favrod dit être sorti des brouillards du Rhône pour surgir à Montreux en 1927. C'est l'année de sa naissance et de Lindbergh : quelques jours après sa naissance, l'Atlantique est franchi en avion et le monde se rétrécit. C'est aussi les préparatifs de la fête des vignerons de Gustave Doret et Ernest Biéler. Une fête gréco-romaine et mythologique. Sa mère lui a reproché pendant son enfance de l'en avoir privée. Sa famille est originaire du Pays-d'Enhaut, qu'elle a quitté pour descendre au bord du lac autour du XVIe siècle.
00:01:41 – 00:03:05 (Séquence 4) : Charles-Henri Favrod parle de son arrière-grand-père, Abraham. Attaché à la Bible, il était contre les changements, la modernité. La vapeur, selon lui, était contraire aux commandements car on n'unit pas le feu avec l'eau. Ses craintes étaient selon lui fondées, lorsqu'en 1892 sa grand-mère, enceinte de son père, a raté le bateau à vapeur à Montreux, le "Mont-Blanc" qui a explosé en rade de Lausanne. Ses craintes de la modernité se sont encore justifiées au moment de la vente de terres familiales. Ces terres se trouvaient là où était prévue la construction du Montreux Palace. Son grand-père et arrière-grand-père se sont battus pour les sauver. Ils ont fini par les vendre en plaçant l'argent dans une banque qui a fait faillite par la suite. Ça a été le premier grand scandale bancaire du canton.
00:03:07 – 00:05:08 (Séquence 5) : Charles-Henri Favrod parle de son père qui avait réalisé qu'ils ne pouvaient plus être des paysans sans terres. Il se souvient bien de la ferme familiale, dans laquelle il n'y avait pas de moteurs et qui comptait toute une série de chars. L'abreuvoir est tout ce qu'il en reste aujourd'hui à la ruelle du Cygne, il est devenu un monument historique. Son père a choisi un autre destin, il a rompu avec sa famille et ouvert un magasin de tabac et cigares à l'avenue des Alpes. Il a certainement subi l'influence d'un oncle français, Marius, de Saint-Gingolph, frère de sa grand-mère savoyarde. Personnage pittoresque, il a certainement voyagé en Indochine, et a poussé son père vers l'exotisme et le cosmopolitisme, vers lesquels Montreux allait aussi. En 1927, il reprend un commerce de vins et liqueurs à la Grand-Rue. Deux ans après, son père doit affronter la crise et les angoisses, c'est le Krach de Wall Street. C'est le contexte dans lequel il a grandi jusqu'à la deuxième guerre mondiale.
00:05:11 – 00:05:57 (Séquence 6) : Charles-Henri Favrod se souvient avoir beaucoup joué dans le magasin de son père. Il y avait des caves très profondes qui allaient presque à la gare de Montreux. Les caves étaient pleines d'alcools et il y avait une douce euphorie dans l'air. Charles-Henri Favrod apportait des échantillons à la marchande de glaces, madame Bodin, et grâce à elle il pouvait ensuite donner les échantillons de glaces à ses copains.
00:06:00 – 00:07:23 (Séquence 7) : Charles-Henri Favrod parle de sa mère. Elle était aussi en rupture. Elle était fille de boulanger, elle avait décidé d'apprendre l'anglais. Elle est allée à Edimbourg dans la famille des Bartholomew, les cartographes du roi, et a donc découvert la grande société britannique et l'ordre colonial. Elle était nostalgique de cette période. Charles-Henri Favrod était troublé d'entendre sa mère lui dire qu'il aurait pu avoir un père écossais. Sa mère rêvait qu'il devienne quelqu'un, qu'il sorte de la campagne et de la malédiction de la crise. Il l'agaçait car il allait jouer avec ses cousins dans les fermes, à Tavel, Sonzier, Crin, Veytaux, et il sentait le fumier. Sa mère lui reprochait ce retour aux origines. Elle était rétive à l'ordre ancien, dont elle avait souffert. Elle avait été accueillie avec un certain mépris dans le domaine de son père.
00:07:27 – 00:09:23 (Séquence 8) : Charles-Henri Favrod parle de son enfance et sa formation à Montreux. Sa mère voulait qu'il devienne quelqu'un et il a donc suivi le collège. Il a découvert un Montreux opposé à la tradition presque biblique de la campagne. Aujourd'hui il ne reste presque plus aucune trace de l'époque des villages qui formaient Montreux. Le collège réunissait des élèves vaudois et beaucoup d'étrangers. C'était le côté cosmopolite de Montreux, étape de l'Orient-Express, avec ses jardins anglais, ses casinos et ses hôtels. C'était une période très grise, jusqu'à la guerre, mais pour lui avec tous les attributs de la modernité : il avait un superbe appartement avec terrasse et une automobile, une Ford. Jusque-là, la seule voiture qu'il connaissait était celle de monsieur Savio, le chauffeur des hôtels.
00:09:28 – 00:10:21 (Séquence 9) : En 1942, Charles-Henri Favrod contracte la tuberculose. Sa sœur avait été infectée la première, car elle avait soigné des soldats tuberculeux. Ils sont tous deux obligés d'aller dans un sanatorium pendant deux ans. Cet éloignement survient dans un moment particulier, la guerre qui les avait déjà coupés du monde extérieur. Il séjourne sur la "montagne magique", avec des adultes. Sa seule occupation est la découverte de la collection complète de "l'Illustration". Il se familiarise avec le XIXe siècle et découvre l'image et l'histoire.
00:10:26 – 00:11:32 (Séquence 10) : Charles-Henri Favrod parle de sa formation. De ses années de gymnase, il se souvient en particulier, comme tous les gymnasiens de sa génération, de Jean Franel avec sa barbe de Zeus et ses tonnerres. A l'université, il étudie le grec avec André Bonnard et, comme tous ses étudiants, il va être suspecté de communisme. Sa fiche, découverte par la suite, le décrit comme un extrémiste car il avait présenté pour les dix ans de la guerre d'Espagne en 1946 "L'espoir" de Malraux à la salle des 22 Cantons. André Bonnard avait été arrêté en gare de Zurich avec des textes incompréhensibles, il s'agissait des thèmes en grec de ses élèves. C'était une étrange époque, ils sortaient de la guerre et se trouvaient dans un autre enfermement. Charles-Henri Favrod avait envie d'aller plus loin.
00:11:38 – 00:13:26 (Séquence 11) : Charles-Henri Favrod parle de la deuxième guerre mondiale et de ses conséquences. Les informations arrivaient par le Cinéac, la radio, les revues, de "Signal" en particulier, et les papiers de René Payot. Ces médias donnaient une vision assez fragmentée. La guerre était imaginable mais pas ses conséquences. Il voyage à Berlin et découvre un pays anéanti, dans la poussière rouge de Hambourg, grise de Berlin et jaune de Frankfort. Il se souvient d'avoir survolé Berlin en se demandant où il aurait pu loger. Du ciel jusqu'au Tempelhof, il ne voyait que des ruines. En Italie aussi, dès la gare de Milan, les désastres de la guerre étaient visibles partout. Il est allé jusqu'en Calabre et Lucanie. Les ruines italiennes n'étaient pas comme les ruines allemandes. Les italiens avaient réussi à retrouver leur nature, il y avait déjà une espèce d'euphorie de vivre.
00:13:32 – 00:14:10 (Séquence 12) : L'interlocuteur demande à Charles-Henri Favrod si à l'époque, en tant qu'élève du Professeur Bonnard, il possédait des informations sur le sort que la Suisse réservait aux juifs. Il rappelle qu'ils étaient des adolescents mais qu'ils savaient que depuis 1935 il y avait des razzias systématiques, que l'Allemagne les pourchassait. Ils ne savaient pas qu'ils les exterminaient. La surprise et la stupéfaction sont arrivées avec les premières images des camps en 1945. C'étaient des images quasi interdites, peu de journaux les ont publiées.
00:14:17 – 00:16:56 (Séquence 13) : Charles-Henri Favrod parle de son premier voyage à l'étranger. En 1945, il part à Paris. Il en était fasciné comme tout adolescent qui ouvre un livre. Comme il avait beaucoup lu, il avait l'impression de la connaître avant d'y arriver. Il y a trouvé des gens résignés, c'était une époque grise. Il n'y avait pas encore la vitalité, comme par la suite, de Saint-Germain-des-Prés. Il avait envie de rencontrer les écrivains chez eux. Les ayant lus, il ressentait la nécessité de voir qu'ils existaient. Il est allé voir Breton à la rue Fontaine. Ce dernier a été très généreux. Les écrivains avaient envers les Suisses un sentiment de reconnaissance. Fort de l'amitié d'Elie Gagnebin, il est allé rue Montpensier chez Cocteau, chez Audiberti et Ponge ensuite. Il était en correspondance avec Saint-John Perse pour lequel il avait une grande fascination. Charles-Henri Favrod pense avoir été très audacieux. Il sait qu'aujourd'hui il ne serait plus possible de faire cette expérience.
00:17:03 – 00:18:48 (Séquence 14) : Charles-Henri Favrod parle de sa rencontre avec Jean-Paul Sartre. En 1948, avec d'autres, il décide de monter un scénario de Sartre, "Les Faux-Nez". Il est allé rue Bonaparte chez Sartre mais Jean Cau, son secrétaire, ne l'a pas laissé entrer. En descendant les escaliers, il aide une dame à monter ses courses : c'était la mère de Jean-Paul Sartre, qui l'a naturellement fait entrer. Ils ont pu conclure un accord pour le scénario des "Faux-Nez". Charles-Henri Favrod se souvient que Sartre était en robe de chambre, avec sa veste de pyjama à 11 heures du matin. C'était, aux yeux du jeune vaudois qu'il était, une tenue étonnante. En 1948, Charles-Henri Favrod était président des "Belles-Lettres" et il devait monter un spectacle. Pour "Les Faux-Nez", il avait fait venir Claude Luter et toute la bande des Lorientais. Même Boris Vian aurait dû venir mais il était malade. Le spectacle a été joué à Lausanne et Montreux, ce fut une fête fantastique.
00:18:56 – 00:20:58 (Séquence 15) : Charles-Henri Favrod explique que l'envie d'aller à l'étranger était forte dans sa génération car ils avaient été captifs. Il avait aussi un énorme appétit de connaître. Les pays européens l'avaient comblé mais il voulait aller plus loin. Grâce à Pierre Béguin, auquel il avait fait des offres de service à la "Gazette de Lausanne", il prépare un voyage autour de la Méditerranée. En 1952, il part à la découverte du monde idéal, rêvé pendant ses études, décrit par Théocrite, Homère et Virgile. Israël avait à peine deux ans, les pays arabes commençaient à être en effervescence. La Tunisie balbutiait son autonomie, l'Algérie on la croyait soumise pour toujours à la France, et le Maroc commençait aussi à crépiter. Il réalise que le monde change vite. A Alger et Casablanca, il trouve un message, une demande en mariage. Marguerite, avec laquelle il vivait depuis 1949, pressée par sa tante, voulait régulariser leur situation. Le mariage a eu lieu au Château de Gilly chez la tante. Il abrège son voyage avec le besoin de le reprendre et d'aller même plus loin.
00:21:06 – 00:22:28 (Séquence 16) : Charles-Henri Favrod se marie le 23 juillet 1952 mais, très vite, il reprend la route. Il veut aller où les choses se passent et à l'époque c'était l'Indochine. Il devient correspondant de guerre, un mot qu'il n'aime pas. Il arrive à Saigon en pleine mousson. Il fallait, avec l'avion "Constellation", deux jours pour arriver en Extrême-Orient. A chacun des retours, dans les escales, il a pu découvrir de nombreux pays : Thaïlande, Birmanie, Pakistan oriental et occidental, Inde, qui était indépendante depuis peu et les pays arabes. Charles-Henri Favrod est allé loin dans le continent asiatique. Mais c'est vers l'Afrique qu'il s'est ensuite dirigé pour y voir encore l'ordre colonial en place. L'Afrique noire à partir de 1954 devient son terrain d'opération pour la "Gazette de Lausanne" et la "Radio Suisse romande".
00:22:36 – 00:23:42 (Séquence 17) : Charles-Henri Favrod parle de son travail de correspondant. Pierre Béguin lui avait fait confiance. Il avait été généreux. Il transmettait ses papiers par la poste et donc avec la lenteur nécessaire, la lenteur de la malle des Indes. L'avion "Constellation" y allait en 48 heures. Le "Comet", l'avion à réaction anglais, avait renversé complètement les données. Charles-Henri Favrod a échappé à la catastrophe, comme sa grand-mère qui n'avait pas pris le bateau : un avion "Comet" s'y est écrasé.
00:23:50 – 00:24:40 (Séquence 18) : Charles-Henri Favrod a couvert la guerre d'Indochine. Lors de son travail de correspondant, il découvre la vérité de la guerre, ce qu'elle a d'impitoyable et la peur sous le feu. Il se souvient en particulier d'une embuscade près du camp de Nassam, il était en compagnie d'un médecin qui est devenu célèbre par la suite, Henri Laborit. Le médecin faisait des expériences sur la réfrigération des blessés graves, un système pour réussir à les emmener jusqu'à une salle d'opération.
00:24:49 – 00:25:26 (Séquence 19) : Charles-Henri Favrod décrit Lucien Bodart, un ami chez qui il a logé. Alors qu'ils étaient au front, Lucien Bodart était souvent au bar de l'hôtel Continental où il improvisait des papiers magiques. Lucien Bodart, était le correspondant de "France-Soir", qui était à cette époque le journal le plus important. Il faisait le ministre de l'Indochine, de la guerre, il faisait les généraux. Il est fascinant pour Charles-Henri Favrod d’avoir connu Lucien Bodart alors qu’il était déjà mandarin dans son aspect. Celui-ci n'avait pas encore écrit ses grands romans.
00:25:36 – 00:27:35 (Séquence 20) : Charles-Henri Favrod est revenu traumatisé de la guerre d'Indochine. C'est pour cela qu'il a souhaité aller en Afrique, car elle était encore paisible, même si elle allait fatalement vers le désordre, et qu’il voulait l’observer de près. Toutes les étapes de voyage pour aller de Dakar à Djibouti n’étaient pas faciles. L’Afrique est un pays de l'accueil qui l'a ému : un pays neuf, au sens des premiers jours du monde. Les lecteurs de la "Gazette de Lausanne" n’étaient pas encore concernés par ce qui allait se passer en Afrique. Pierre Béguin lui conseillait de retourner en Asie où des choses se passaient. A partir de 1954, les choses s'aggravent en Afrique du Nord, en Algérie. Charles-Henri Favrod va suivre l'Afrique noire, qui est de plus en plus concernée et qui adhère aux causes algériennes, et va traiter "l'affaire algérienne" au Caire, à Tripoli, à Tunis, à Rabat et Alger.
00:27:46 – 00:28:21 (Séquence 21) : Charles-Henri Favrod explique son rôle dans la résolution de la guerre d'Algérie. Il dit avoir toujours été discret à ce sujet. Il a joué le rôle de "Go beetwin". Il avait la confiance des Algériens, et beaucoup d'amis français. Il réalise que les deux parties souhaitaient une issue au conflit. Il fallait donc trouver un point de convergence. Il a été le porteur de messages, même du Général de Gaulle. Il a été très proche du directeur du cabinet de Michel Debré. Pendant ce temps, les Algériens étaient très attentifs.
00:28:32 – 00:30:10 (Séquence 22) : Charles-Henri Favrod parle de son rôle de médiateur entre le pouvoir de la Métropole, la France, et le Front de Libération nationale en Algérie. Il devait organiser des rencontres, qui souvent étaient très compliquées. Les niveaux, les ministres changeaient souvent de fonction et par exemple le ministre Michelet était désireux d'établir un contact direct avec Ferhat Abbas. Il se souvient d'une rencontre à Genève sur le quai du Mont-blanc, ils ne savaient pas où aller, car chacun avait pensé que l’autre s’occupait de réserver un lieu, et c'est l'Hôtel d'Angleterre qui a été choisi. Il est ainsi devenu un lieu très important de rencontres préliminaires pour les négociations d'Evian. Ces négociations devaient être précédées de longs contacts secrets. Charles-Henri Favrod a même amené une bande vidéo où le premier ministre, Michel Debré, s'adressait directement à Krim Belkacem, pour prouver que c'était bien ses propos. La propagande reprochait à Michel Debré de ne pas vouloir de négociations. Charles-Henri Favrod a mis de côté son rôle de journaliste pendant un certain temps. Il réalisait que la guerre avait assez duré et qu'elle avait été monstrueuse : trouver une issue au conflit était plus important que son travail.
00:30:22 – 00:30:45 (Séquence 23) : Charles-Henri Favrod a assisté à l'arrivée du président Ahmed Ben Bella à Alger, il a même été de ceux qui ont dû faire antichambre. Il se souvient des journalistes français qui n'étaient pas particulièrement liés à la cause algérienne et qui étaient reçus avant les compagnons de route comme lui. Il se considère compagnon depuis longtemps. Il avait connu Ben Bella au Caire en 1952 alors qu'il venait de s'évader de la prison de Blida.
00:30:58 – 00:31:45 (Séquence 24) : Charles-Henri Favrod explique avoir retrouvé Ben Bella en 1982 à la cinémathèque suisse de Lausanne. Il était en train de faire un film sur lui pour la télévision suisse. Un événement extraordinaire s'est produit. Freddy Buache a voulu lui montrer quelques films sur l'Algérie. Un film en particulier du journaliste Pic : un voyage d'Alger à Oran pour suivre une partie de football. Le président Ben Bella ne manquait pas un match et il avait été arrêté au retour du match filmé dans le documentaire. Ben Bella était dans la salle de la cinémathèque et il regardait le film de sa dernière journée de président. Freddy Buache n'avait pas conscience qu'il était presque en train de lui provoquer une crise cardiaque.
00:31:58 – 00:33:11 (Séquence 25) : Charles-Henri Favrod rentre en Suisse après son aventure algérienne. Il veut se rapprocher de sa famille, il a trois fils qui ne le reconnaissent pas quand il rentre de voyage. Il décide de raccourcir ses voyages et de s'établir à Saint-Prex. Grâce à Pierre de Muralt, il a commencé une activité dans le domaine de l'édition, aux "Editions Rencontre". Il a créé l'"Encyclopédie du monde actuel", et publié, dans l’"Atlas du voyage", des livres de voyage d'auteurs. Charles-Henri Favrod est entré en contact avec des écrivains importants comme Vailland, Vittorini, Claude Roy, Clara Malraux, et avec des photographes qui illustraient ses livres. L'image était importante pour lui, il était responsable aux "Editions Rencontres" de l'iconographie. Il réalise que l'image autant que la vidéo étaient en train de tout modifier.
00:33:24 – 00:35:23 (Séquence 26) : Charles-Henri Favrod explique qu'il a créé avec d'autres, à partir de 1959, deux sociétés d'audiovisuel vouées à réaliser des films pour la télévision. C'est par ce biais qu'ils ont entrepris le film "Le chagrin et la pitié". Terminé en 1969, il est passé à la télévision seulement en 1981. Il a dû attendre l'arrivée de la gauche au pouvoir en France pour être montré aux Français. Il dénonçait ce que furent les années d'occupation. Le film était sorti au cinéma et il montrait des personnalités importantes, Mendès France, Anthony Eden, des généraux allemands, des maquisards. Il dérangeait car il parlait de Bousquet. Il se souvient de la projection avec Mitterrand. Le président ne s'est pas ému de voir ce que l'on disait de l'attitude de Bousquet face à la police allemande et à la rafle du Vel' d'Hiv. Le film a ouvert la boîte de pandore. Son plus grand adversaire a été Simone Veil, qui s'est appliquée à empêcher la projection du film. Le film a été projeté à Paris grâce au bouche-à-oreille.
00:35:36 – 00:36:22 (Séquence 27) : Charles-Henri Favrod parle de son travail aux "Editions Rencontres". L'interlocuteur rappelle qu'ils ont produit une série de portraits filmés de personnalités, de chefs d'Etat. Charles-Henri Favrod explique que l'actionnaire majoritaire, un canadien, s'apprêtait à interrompre ce travail. Ce dernier leur avait annoncé qu'ils ne pouvaient pas faire de cinéma faute de vedettes. Mais ils les ont trouvées tout de suite : Sadate, Dayan, Hailé Sélassié, Bourguiba, Mitterrand, Giscard d'Estaing, Idi Amine Dada, qui avait pris le pouvoir en Ouganda. Avec ces portraits, ils ont trouvé un créneau télévision et cinéma aussi.
00:36:36 – 00:37:55 (Séquence 28) : Charles-Henri Favrod parle de son rapport à la photographie. Elle a occupé dans sa vie une place de plus en plus grande. Il était en contact avec des photographes, qu'il publiait chaque mois. Il les avait rencontrés sur le terrain en Indochine et en Afrique. Là, il était devenu l'ami de Roger, un photographe qui avait décidé de ne plus quitter l'Afrique dès la fin de la deuxième guerre mondiale. Il avait été le photographe du Général de Gaulle dans l'expédition Cameroun, Tchad, Strasbourg. Ces photographes étaient tous des amis. Il crée la "Fondation suisse pour la photographie". En 1985, il ouvre le "Musée de l'Elysée" à Lausanne : un moment très passionnant parce qu'il a pu y faire de l'histoire de la photographie.
00:38:09 – 00:39:42 (Séquence 29) : Charles-Henri Favrod parle de son travail au "Musée de l'Elysée" à Lausanne : un musée entièrement dédié à la photographie internationale et suisse, depuis sa création jusqu'à aujourd'hui. A travers les grandes rétrospectives, il tente de montrer le monde en mouvement. Il cite l'exemple de l'exposition sur les revendications des étudiants sur la place Tiananmen. Il se trouvait au début des manifestations à Pékin pour ouvrir une exposition du musée. Il a établi des contacts et a reçu presque tous les jours des photos de la place. Après le massacre, il a monté une exposition en plein air dans le cadre de la nuit de la photo. A partir de 1989, l'exposition a circulé dans tous les pays de l'Est : Prague, Budapest, Bucarest, Berlin, ou le mur était tombé, Varsovie, Cracovie. Ils n'ont pas réussi à aller à Moscou.
00:39:57 – 00:40:36 (Séquence 30) : En 1990, le "Musée de l’Elysée" a été mobilisé pour organiser une exposition de 100 photographes de l'est. Ils voyaient les images des uns et des autres pour la première fois. Charles-Henri Favrod réalisa alors que, dans le bloc de l'Est, on ignorait ce qui se passait d'un pays soviétique à l'autre, car les échanges étaient interdits. Lausanne est devenue une sorte de capitale de l'Est renouvelé. Au vernissage de l'exposition Olga Havel était présente.
00:40:51 – 00:41:40 (Séquence 31) : Sous la direction de Charles-Henri Favrod au Musée de l'Elysée, il y avait selon l'interlocuteur, une sorte de fraternité entre la photographie, le réel et les spectateurs. Charles-Henri Favrod pense en effet que le musée a rassemblé plusieurs générations. Il a été surtout surpris de voir le rassemblement des aînés. La connaissance de l'histoire de la photographie s'est affinée, il a vu se généraliser en Suisse et ailleurs des expériences du même type. Des relations se sont créées à travers le monde entier, qui ont permis la circulation des expositions. Ils sont allés, par le biais du musée, en Amérique latine, en Asie, en Afrique, dans toute l'Europe et aux Etats-Unis. Charles-Henri Favrod précise que ce dernier voyage n'a pas été simple étant donné leur refus de s'intéresser à ce qui se passe en Europe.
00:41:56 – 00:43:14 (Séquence 32) : Charles-Henri Favrod définit ce qu'est une photographie. Selon lui, elle est une énigme, quelque chose qui trouble profondément, qui s'intègre et devient une image mentale mémorisée durablement. Avec la photographie, il y a la stupeur, dès le début, de voir le monde imprimé; une même stupeur se trouve au cinéma et à la télévision. Il rappelle que les frères Lumière ont présenté le cinéma sous le nom de photographies animées. Le cinéma n'est que 16 ou 24 images par seconde. L'interlocuteur cite un ami de Charles-Henri Favrod, Pierre de Fenoÿl, qui disait qu'il n'y a pas d'amour mais uniquement des preuves d'amour. Pour Charles-Henri Favrod, la photographie est une preuve d'amour. Elle est très proche de l'amour, de la fraternité : une manière d'être avec les autres, les époques et d'y être présents.
00:43:31 – 00:44:47 (Séquence 33) : Charles-Henri Favrod a gardé contact avec des photographes. Il travaille beaucoup actuellement avec des photographes italiens. Ils ont fait appel à lui alors qu'il croyait toucher à la retraite. Il continue de faire des découvertes grâce à la photographie. Il est appelé à devenir vice-président d'Alinari à Florence. Les frères Alinari, qui ont créé le premier musée imaginaire, ont été les premiers à photographier les sculptures et les peintures. Ils ont ainsi rendu possible la représentation de l'histoire de l'art. Il pense créer un musée sur la ligne de celui de Lausanne, plus neuf encore, très ouvert à l'Europe.
00:45:04 – 00:46:27 (Séquence 34) : Charles-Henri Favrod parle du temps et de l'époque actuelle. Le temps dure à travers la photographie, la mémoire. Il pense que le XXe siècle a commencé avec la construction métallique, bien avant Eiffel. L'Opéra de Paris a été construit entièrement en métal à partir de 1860. Le XXe siècle est terminé depuis un moment, depuis que l'informatique modifie et perturbe notre destin. Il est étonnant d'avoir les mêmes gestes des générations précédentes. Il continue d'écrire au stylo et à la machine à écrire. Il dit ne pas être contre les changements, il a par exemple informatisé son musée. Il dit qu'on entre souvent dans un nouvel âge avec le pied gauche, comme le président de la France qui, en inaugurant l'Exposition 1900, avait raté l'entrée dans le siècle devant la caméra des frères Lumière.
00:46:45 – 00:47:52 (Séquence 35) : Charles-Henri Favrod parle de son ami Pierre de Fenoÿl. Il a joué un rôle important dans sa vie. Il a amené son ami à la photographie. Avec lui, il a fait des découvertes considérables. Pierre de Fenoÿl est devenu responsable de la photographie au centre Pompidou au moment de son ouverture. Il est mort prématurément et c'est une absence douloureuse. Il pourrait citer beaucoup d'autres personnes encore. Il pense à son beau-père. Il incarnait pour lui la durée, il est mort à 102 ans. Il avait raconté à ses petits-enfants une histoire qu'il tenait de son grand-père, l'assistant de Stephenson à Charleroi, Waterloo en 1815.
00:48:10 – 00:48:28 (Séquence 36) : Charles-Henri Favrod exprime un message pour le futur: un message d'échange et de partage; une prise de conscience de toute la planète et particulièrement du sud qui est notre avenir. Il pense que si cela n'est pas pris en compte, nous nous y perdrons.
00:48:47 – 00:49:03 (Séquence 37) : Générique de fin du Plans-Fixes consacré à Charles-Henri Favrod, journaliste, écrivain et historien, et tourné à Sait-Prex le 16 novembre 1999.
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