Marie-Louise Fournier (Sourde militante)

  • français
  • 2005-12-03
  • Durée: 00:45:18

Die unten dargestellten Filmaufnahmen werden Ihnen über Vimeo (https://vimeo.com/) zur Konsultation angeboten.

Description

Née en 1928 dans une famille valaisanne, Marie-Louise Fournier perd l'ouïe à quatre ans, après une méningite. Tôt séparée des siens, elle est scolarisée à l'Institut du Bouveret à une époque où le monde des entendants interdit aux sourds de s'exprimer par des signes. Ses enfants élevés et devenue veuve, elle s'engage dans la défense des droits des sourds et pour la langue des signes, seule manière de les rendre indépendants.

00:00:00 – 00:00:10 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Marie-Louise Fournier et tourné à Lausanne le 3 décembre 2005. L’interlocutrice est Monique Aubonney, l’interprète est Françoise Rickli.
00:00:10 – 00:00:48 (Séquence 1) : Des cartons expliquent que le sujet sera celui de la surdité et de la langue des signes : "Il vous arrive parfois de croiser dans la rue des sourds sans que vous ne vous en rendiez compte. En effet, la surdité ne se voit pas. Elle devient visible au moment où vous constatez un problème de communication entre vous et la personne sourde, ou au moment où cette dernière s'exprime en langue des signes. Cela devient alors un handicap de communication partagé. De tout temps, les sourds ont su compenser leur absence d'audition en élaborant naturellement "une langue sur mesure", la langue des signes. C'est une langue à part entière, qui permet de tout exprimer. La langue des signes possède sa propre grammaire et véhicule une identité et une culture propres aux sourds."
00:00:48 – 00:01:12 (Séquence 2) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Marie-Louise Fournier et tourné à Lausanne le 3 décembre 2005. L’interlocutrice est Monique Aubonney, l’interprète est Françoise Rickli.
00:01:13 – 00:02:09 (Séquence 3) : L'interlocutrice explique que Marie-Louise Fournier est connue comme personnalité sourde qui a cherché à améliorer les conditions de vie de ses pairs pour leur permettre d'évoluer. Elle lui demande ensuite comment tout a commencé. Marie-Louise Fournier répond que cela s'est fait par hasard : elle s'est trouvée, à la cinquantaine, ayant du temps pour elle, notamment suite au décès de son mari et ses enfants étant déjà grands. Elle sentait le besoin de faire quelque chose et c'est alors qu'elle a été engagée pour travailler avec les sourds, alors qu'auparavant, elle n'y avait jamais songé.
00:02:10 – 00:05:12 (Séquence 4) : Marie-Louise Fournier explique être née à Salins, près de Sion, dans un petit village d'une dizaine de maisons. Il y avait neuf enfants, ce qui implique que sa mère était au foyer. Leur père était cantonnier et possédait un peu de campagne avec des vaches et des chèvres. Marie-Louise Fournier était la cinquième de la fratrie. Leur vie était simple : ils vivaient bien, sans beaucoup d'argent. A quatre ans, Marie-Louise est tombée malade d'une méningite. Elle se souvient avoir été emmenée à l'hôpital en voiture. Elle s'est réveillée un jour dans un lieu étrange et a réalisé progressivement qu'elle n'entendait pas ce que disaient sa mère et les médecins. Elle ne comprenait rien et attendait, pendant qu'on la soignait. Puis, un jour, sa mère lui a apporté des souliers neufs et elle a cru pouvoir partir, mais ce n'était pas le cas.
00:05:14 – 00:07:25 (Séquence 5) : Marie-Louise Fournier raconte le choc de devenir sourde, alors qu'elle était entendante auparavant. Elle n'a pas réalisé immédiatement et ne comprenait rien à la situation : elle croyait que les gens, fâchés, ne voulaient plus lui parler. Ensuite, au lieu d'aller directement à la maison, on l'a envoyée chez sa grand-mère, puis chez une tante, afin qu'elle soit au calme et bénéficie de beaucoup d'attention et de repos. Elle ne se souvient pas combien de temps cela a duré, mais un jour, sa mère est venue la chercher pour l'amener à l'internat chez les sœurs. Ce fut très dur pour elle, car elle était loin de chez elle, avec beaucoup d'inconnus. Une adulte a été désignée pour s'occuper d'elle, selon le protocole de la maison.
00:07:28 – 00:09:35 (Séquence 6) : Marie-Louise Fournier évoque sa vie à l'internat au Bouveret et en raconte une journée type. Elle explique sans vouloir être méchante que l'éducation laissait à désirer, car beaucoup de choses se passaient en silence. Les classes consistaient à apprendre à articuler et Marie-Louise avait moins de difficultés puisqu'elle parlait déjà avant de devenir sourde. Elle se souvient des autres élèves qui peinaient. La communication entre camarades se faisait par signes et gestes, mais il ne fallait pas montrer cette façon de communiquer.
00:09:38 – 00:10:18 (Séquence 7) : Marie-Louise Fournier évoque son expérience de la messe : ne comprenant rien et n'entendant ni les chants ni la musique, elle observait les gens et les sœurs pour se distraire.
00:10:22 – 00:10:53 (Séquence 8) : Marie-Louise raconte avoir appris la langue des signes, même si elle était interdite en principe à l'école. Les grands sourds s'exprimant ainsi en cachette, elle a appris progressivement, malgré l'obligation scolaire de parler oralement.
00:10:57 – 00:12:03 (Séquence 9) : Marie-Louise Fournier explique avoir été une élève plus ou moins sage à l'internat. Elle s'énervait facilement, mais tout se passait bien. A l'époque, les élèves restaient tout le temps à l'internat et ne rentraient pas à la maison : ils y passaient neuf mois, d'octobre à juin. C'était long et la séparation d’avec la famille était dure. Les enfants recevaient parfois une lettre, mais pas souvent et encore moins de visites, car le Valais est un canton étendu et le train coûtait cher. Or, les parents de Marie-Louise Fournier n'avaient pas beaucoup d'argent et ne venaient que rarement. Cela ne l'empêche pas d'avoir de bons souvenirs de sa vie à l'école.
00:12:07 – 00:13:56 (Séquence 10) : Marie-Louise évoque sa vie, entre internat et famille : chaque fois qu'elle revenait chez elle, il y avait un peu de tension au début. Puis, les échanges reprenaient et elle s'exprimait en signes, un mode de communication que ses parents ne lui ont jamais appris. Les autres enfants l'imitaient en faisant des signes et la communication passait bien. Marie-Louise Fournier a cependant connu une période où elle communiquait davantage avec les plus jeunes de ses frères et sœurs. Elle garde de bons souvenirs de vacances : sa mère la laissait dormir le matin, alors que les autres travaillaient à la campagne, faisant les foins ou gardant les chèvres. Une fois levée, elle mangeait le plat que sa mère lui avait laissé dans le four et lisait le mot qui l'accompagnait, elle savait ainsi ce qu'elle avait à faire. Sa mère avait compris que Marie-Louise comprenait globalement ce qu'elle disait à l'oral et ne transmettait que les choses les plus importantes par écrit.
00:14:00 – 00:14:41 (Séquence 11) : Marie-Louise Fournier dit avoir eu une enfance heureuse. Son père travaillait comme cantonnier. A midi, sa mère lui faisait porter ses repas : c'était la seule communication de Marie-Louise avec son père, qu'elle regardait manger. Ils parlaient peu, elle le regardait vivre et il était gentil.
00:14:46 – 00:17:07 (Séquence 12) : Marie-Louise Fournier évoque sa vie professionnelle. Elle a terminé l'école à 14 ans et demi, après neuf ans d'internat. Elle avait peu d'options, car à l'époque les sourds ne pouvaient pas étudier et sa famille n'avait pas beaucoup d'argent : ses sœurs aînées sont d'ailleurs parties pour gagner leurs vies. Son père lui a alors offert trois possibilités : repasseuse, ménagère ou couturière. Or, il y avait à Sion une dame couturière qui était sourde. Marie-Louise Fournier est allée chez elle et a trouvé cela vraiment très bien : la dame, âgée, articulait bien et faisait quelques gestes. Elle lui a donc enseigné la couture mais aussi et surtout la vie à l'extérieur. Auparavant, Marie-Louise vivait, en effet, en monde clos à l'internat et c'est grâce à cette dame qu'elle a appris à vivre : elle l'envoyait faire des courses, ce que Marie-Louise n'aimait pas. Si à l'école, on lui disait qu'elle parlait bien, à l'extérieur, on ne la comprenait pas. La dame a alors insisté pour qu'elle fasse des expériences et notamment qu'elle aille donner les vêtements terminés : elle lui expliquait le chemin à prendre, ce qui a permis à Marie-Louise de beaucoup apprendre. Hélas, elle n'a pas pu rester longtemps, six mois, car la dame a déménagé ensuite avec sa famille dans le canton de Vaud. Elle a trouvé une autre place, où le patron était gentil, et elle a pu poursuivre son apprentissage de couturière.
00:17:13 – 00:18:43 (Séquence 13) : Marie-Louise Fournier a rencontré son mari, à 14 ans, alors qu'elle venait de terminer l'école. Il était sourd comme elle. Elle a bien essayé d'avoir des amis entendants, mais il y avait toujours des problèmes de communication ou alors les discussions étaient superficielles. A l'époque, son mari et elle avaient participé à la même sortie et s'étaient croisés, mais sans que cela aille plus loin. Lui sortait peu et était timide. A la fin de son apprentissage, Marie-Louise Fournier est partie à Paris. A son retour, elle est allée à l'enterrement d’un cousin vers Nendaz. Elle y a revu un sourd, qu'elle connaissait et qui était tailleur. Celui-ci lui a présenté une personne sourde, qui n'était autre que son futur mari.
00:18:49 – 00:19:39 (Séquence 14) : Marie-Louise Fournier évoque la naissance de ses enfants, après son mariage, avec un homme sourd comme elle. Sa famille était un peu inquiète pour Marie-Louise Fournier et son mari, mais elle les a laissés se débrouiller. Leur première question quand leur premier enfant est né fut : est-ce qu'il entend ? C'était dur, mais elle considère cela comme normal. Marie-Louise a trouvé difficile d'élever son premier enfant, car elle hésitait et s'inquiétait de faire les choses correctement : elle le surveillait beaucoup.
00:19:45 – 00:21:05 (Séquence 15) : Marie-Louise Fournier évoque son expérience de la maternité. Comme il n'y avait pas d'avertisseur lumineux, pour lui indiquer que son bébé pleurait, elle devait être très vigilante. Elle contrôlait davantage sa couche, une fois le dernier biberon donné, pour éviter les faux plis. En général, tout se passait bien, mais si l'enfant était malade, il fallait venir le voir plus souvent. En famille, la communication entre son mari et elle se faisait en signes, notamment car il n'était pas très bon pour lire sur les lèvres. De fait, leurs enfants s'exprimaient aussi ainsi, mais Marie-Louise veillait à ce que cela soit dans un cadre privé, afin qu'ils communiquent par oral à l'extérieur. Elle le regrette maintenant, car après le décès de son mari, ils ont communiqué de plus en plus oralement.
00:21:12 – 00:21:51 (Séquence 16) : Marie-Louise Fournier évoque le décès de son mari, elle avait alors 45 ans. A cette époque, sa mère demeurait chez elle et elle s'en occupait, car elle ne pouvait sortir seule. Puis, sa mère est décédée également cette même année. Ce fut une année charnière pour Marie-Louise. Elle était déjà active dans les sociétés de sourds valaisannes, lors de rencontres et de sorties. Son mari a même été président un temps, tandis qu'elle-même était membre du comité.
00:21:58 – 00:23:59 (Séquence 17) : Marie-Louise Fournier raconte la façon dont l'ASASM, Association suisse pour l'aide aux sourds-muets à Lausanne, l'a contactée. Elle avait du temps, car ses enfants étaient grands et sa mère venait de décéder. L'association l'a contactée pour lui proposer de reprendre le poste de rédactrice du journal, l'ancien "Messager". Après avoir hésité, Marie-Louise Fournier s'est lancée, aidée par son statut de membre du comité de la Fédération Suisse des Sourds. Ceci s'est révélé ensuite problématique, car l'ASASM et la Fédération ne sont pas identiques. La première souffrait d'une sous-représentation des sourds et la seconde, d'un manque de moyens. L'ASASM, organisme romand, avait son pendant à Zurich et un service au Tessin. Le problème venait principalement du fait que les personnes œuvrant pour les sourds étaient des entendants. Marie-Louise Fournier a donc été engagée pour le journal et les relations publiques : elle allait où il fallait montrer des sourds. La Fédération donnait ses idées et faisait des propositions, reprises au nom de l'ASASM. Marie-Louise Fournier s'est également occupée de toutes les commissions : sur la langue des signes, la télévision, le centre culturel, le téléscript.
00:24:07 – 00:26:59 (Séquence 18) : Marie-Louise Fournier explique que la langue des signes était l'aspect le plus important de son engagement. Elle souligne l'urgence et la nécessité de créer des cours de langue des signes, car sans elle, les sourds ne pouvaient avancer et devaient se reposer sur les entendants. Elle s'est rendue par curiosité au Congrès des sourds en Bulgarie, sans être déléguée. Elle y a vu beaucoup de sourds, mais pas dans les commissions de travail : il y avait bien quelques sourds américains ou finlandais, mais les autres n'étaient que des spectateurs. Les entendants travaillaient pour les sourds et Marie-Louise Fournier a trouvé cela injuste. Pour elle, il était urgent de trouver des interprètes, ce qui était déjà d'actualité à la Fédération, car un Suisse allemand s'était rendu aux Etats-Unis à l'Université des sourds de Gallaudet, pour y apprendre l'anglais. Ayant vu des interprètes, cette personne en a encouragé la pratique à son retour auprès de la Fédération. Marie-Louise Fournier a proposé à l'ASASM de mettre en place des cours de langue des signes. Or, très vite, les participants se sont sentis limités et sont allés suivre des stages à Paris et à Gallaudet. Marie-Louise Fournier y est également allée pour se confronter à la réalité du langage des signes. Elle a pu voir que différentes langues des signes existent et réaliser ce qu'impliquait l'égalité entre sourds et entendants. Faire la différence entre les deux n'était plus possible tant cela fonctionnait bien. Marie-Louise Fournier donne l'exemple d'une personne en pleine conversation téléphonique qui s'est mise à signer en la voyant pour qu’elle puisse être témoin de la discussion, comme un entendant aurait pu l'être.
00:27:07 – 00:28:20 (Séquence 19) : Marie-Louise Fournier évoque son expérience à la commission pour la télévision et les sourds, notamment autour de la question du sous-titrage, objet de demandes répétées. Le sujet était toujours reporté, jusqu'à ce que la télévision leur donne 30 minutes d'émission, alors que personne de la commission n'était prêt. Comme cette chance ne pouvait se refuser, ils se sont lancés : la télévision leur donnait l'infrastructure, mais le contenu leur appartenait. Il a fallu trouver un présentateur, faire des essais avec différentes personnes, puis opérer une sélection, afin d'avoir quelqu'un qui parlât bien, tout en sachant la langue des signes. Une fois cette personne trouvée, il a fallu préparer les émissions. L'expérience n'a pas été facile, car elle a été effectuée dans le stress.
00:28:29 – 00:30:43 (Séquence 20) : Marie-Louise Fournier explique l'influence de la présence des interprètes dans sa vie. Cela a été un grand changement car les sourds ont pu exprimer leurs besoins sans passer par une personne de leur entourage qui n’est jamais neutre. L’interprète transmet l'information telle quelle. Ce progrès est principalement dû à l'avènement de la langue des signes. En effet, pendant longtemps Marie-Louise Fournier ne signait pas : on le lui interdisait et elle culpabilisait si elle le faisait. Les gens disaient que cette langue n'était pas belle et qu’elle était une langue de singes. Il fallait toujours suivre le modèle des entendants et la surdité était niée. Changer tout cela n'a pas été facile et a demandé du temps : Marie-Louise a attendu l'âge de 50 ans pour se mettre à signer à l'extérieur. Aujourd'hui, avec la reconnaissance de la langue des signes comme langue des sourds, elle se sent mieux et comme une personne à part entière, égale aux autres.
00:30:53 – 00:31:46 (Séquence 21) : Marie-Louise Fournier explique que lors de rencontres importantes, elle prend un interprète et regrette que cela soit si long et difficile de faire admettre la langue des signes, même pour les sourds, qui préfèrent l'utiliser en privé. A ce propos, elle cite en exemple, une personne âgée venue au centre de culture : elle avait honte, car ayant rencontré dans le bus une interprète qui avait communiqué avec elle en langue des signes, elle avait constaté que les gens pensaient que c'était elle l'interprète. La personne pensait qu'à l'extérieur, cela ne se faisait pas de communiquer par signes. Cela illustre l'évolution quant à la présence d'interprètes pour les sourds.
00:31:56 – 00:32:54 (Séquence 22) : Marie-Louise Fournier explique l'amélioration de sa vie avec le langage des signes : même le regard de sa famille a changé et elle a pu enfin s'affirmer. Elle était fière d'elle-même et d'être découverte sous ce jour nouveau par ses proches. D'ailleurs, elle s'exprime mieux ainsi. Elle se sent bien dans le monde des sourds, car il n'y a pas de pression, notamment due à la peur de ne pas comprendre et ce, même avec des amis.
00:33:04 – 00:35:22 (Séquence 23) : Marie-Louise Fournier s'est beaucoup battue pour le droit des sourds à l'égalité, car à son époque, l'AI – assurance invalidité – n'existait pas. Désormais, cette dernière prend en charge les appareils auditifs et les téléscripts. Les sourds se sentent moins coupables aujourd'hui. Avec l'AI, il est possible d'employer un interprète, ce qui, avec "l’Emission des sourds", donne une bonne image de la communauté. De plus, les progrès techniques, comme le fax, sont bénéfiques à tous. Cela facilite le contact avec les entendants. Dans la même optique, le centre culturel des sourds a beaucoup aidé, notamment la Fédération. Marie-Louise Fournier a participé à la commission qui l'a conceptualisé : c'était le bon moment pour le créer, puisque cela a fait suite à la dissolution de l'ASASM et à la récupération d'une partie de ses activités par la Fédération. Les sourds ont pu s'occuper eux-mêmes de leurs problèmes, sans avoir à passer par des intermédiaires ne pouvant se mettre à leur place. Le centre culturel a permis de faire travailler des sourds comme professionnels.
00:35:33 – 00:36:49 (Séquence 24) : Marie-Louise Fournier évoque son expérience de travail à l'ASASM, notamment les relations entre sourds et entendants, en la comparant à son expérience à la Fédération des Sourds. Elle travaillait à l'époque en tant que rédactrice du journal. Tant la situation que la philosophie étaient différentes, puisque la Fédération œuvrait à l'autonomie des sourds, tandis que l'ASASM cherchait à les aider, mais n'employait que des entendants. Les sourds, en nombre trop restreint, ne pouvaient donc pas dire ce qu'ils voulaient. En outre, l'attitude paternaliste de l'organisme énervait Marie-Louise Fournier. Le manque d'interprètes a par ailleurs entraîné des tensions et des disputes. Parfois, elle souhaitait en faire part dans le journal, mais elle était censurée. Une fois la Fédération mise en place et avec le nouveau journal "Sourds d'aujourd'hui", elle a pu continuer ce qu'elle avait commencé dans "Le Messager" et dire ce qu'elle pensait.
00:37:00 – 00:37:40 (Séquence 25) : Marie-Louise Fournier évoque son expérience de travail à l'ASASM, où elle est restée sept ans, et à la Fédération des sourds, où elle est restée sept ans également. Le bilan de toutes ces années est positif, car elle estime que la situation s'est améliorée, même si ce n'est pas terminé. Elle pense qu’il faut maintenant laisser la place aux jeunes, pour qu'ils continuent à lutter.
00:37:52 – 00:39:44 (Séquence 26) : Marie-Louise Fournier explique que maintenant encore les entendants ne comprennent pas vraiment la situation des sourds. Ceux qui sont au contact des sourds, notamment des enfants, comme le corps médical, les parents ou les logopédistes, sont sensibilisés. Elle souligne l'importance de continuer le combat, notamment avec l'équipe qui a commencé avec elle et qui est toujours présente et motivée. Elle regrette cependant le manque d'engagement des jeunes sourds, alors qu'ils sont nés avec tous les avantages : ils ne sentent pas le besoin de lutter et vivent sur les acquis, comme le téléscript, le fax ou le visiophone. Marie-Louise Fournier aimerait leur dire à quel point cela est dangereux et qu'il faut poursuivre la lutte pour qu'au moins les acquis soient conservés, malgré l'amputation des subventions de Berne. Il faut pourtant progresser et utiliser la Loi sur l'égalité pour améliorer la situation des sourds. Il faut faire comprendre aux jeunes ce qu'implique cette égalité en termes de conséquences et de définition.
00:39:56 – 00:42:37 (Séquence 27) : Marie-Louise Fournier dit penser aux enfants sourds, qui bénéficient aujourd'hui des progrès médicaux, notamment les implants. Elle décrit cela comme une possibilité donnée par l'évolution des choses. L'implant aide à mieux entendre, ce qui facilite l'école et l'intégration au monde des entendants, mais Marie-Louise Fournier reste sceptique, quant à la qualité d'audition de l'enfant implanté. Ce dernier n'entendra jamais comme un entendant et restera différent, il aura toujours besoin du monde des sourds. Marie-Louise Fournier insiste donc sur la nécessité pour l'enfant sourd de s'identifier à une communauté, pour y trouver une place où il se sente bien. Elle rejette cette idée, récurrente chez les parents, que la langue des signes peut s'apprendre sur le tard. Il faut un minimum de contact et d'échange avec les autres sourds, tout en grandissant pour avoir des valeurs communes. Ceci sans compter que certains jeunes pratiquent le LPC, Langage Parlé Complété, et se sentent supérieurs aux sourds qui signent. Cette attitude n'est pas acceptée par les sourds, car il faut apprendre dès le plus jeune âge à échanger et partager ensemble chacun avec sa différence. La langue des signes s'apprend naturellement dès le plus jeune âge et ne gêne nullement l'apprentissage de la langue orale. Marie-Louise Fournier considère qu'avoir deux langues est une richesse.
00:42:50 – 00:44:05 (Séquence 28) : Marie-Louise Fournier dit avoir trois fils, tous entendants. Comme toutes les mamans, elle sait que les enfants doivent devenir indépendants. Ses enfants vivent dans le monde des entendants depuis l'enfance et ils vivent leurs vies, mais cela n'empêche pas que leur relation à leur mère soit très forte. Elle demande donc aux parents d'enfants sourds de laisser ces derniers aller de l'avant dans le monde des sourds, car c'est leur vie et c'est naturel pour eux. Les parents doivent se retirer pour laisser à leur progéniture la possibilité d'avancer seule ; et ne pas craindre d'être séparés d'eux.
00:44:18 – 00:45:04 (Séquence 29) : Générique de fin du Plans-Fixes consacré à Marie-Louise Fournier et tourné à Lausanne le 3 décembre 2005.
Lien aux découpage sur la base de données original
Ce document a été sauvegardé avec le soutien de Memoriav.
304 Documents dans la collection
Commenter