Mère Sofia (Aumônière de rue)
- francese
- 1995-09-29
- Durata: 00:48:30
Die unten dargestellten Filmaufnahmen werden Ihnen über Vimeo (https://vimeo.com/) zur Konsultation angeboten.
Descrizione
Avec sa croix et son habit bleu, Mère Sofia exerce son ministère dans les rues de Lausanne. La force de la foi l'anime. Son terrain d'action, c'est la rue. Son combat : la misère matérielle, morale et spirituelle des blessés de la vie. Depuis son enfance, elle vit et agit selon la parole du Christ, et sa révolte reste intacte face à l'injustice contre laquelle elle luttera jusqu'au bout, soutenue par la création d'une Fondation. Ce film tonique révèle une personnalité hors du commun.
00:00:00 – 00:00:22 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Mère Sofia, psychologue, théologienne et aumônière de rue, tourné à Lausanne le 29 septembre 1995. L'interlocutrice est Dominique Jaccard.
00:00:22 – 00:02:39 (Séquence 1) : L'interlocutrice explique que Mère Sofia est une religieuse orthodoxe qui ne vit pourtant pas dans un monastère mais dans un petit appartement au centre de Lausanne. Depuis 1985, elle exerce son ministère dans la rue qui représente pour elle un océan universitaire. La rue est pour Mère Sofia un lieu de rencontres, notamment de personnes qu'elle décrit comme blessées par la vie. Elle parle d'une société marginalisée, fracturée de la société lausannoise, et dit vouloir expliquer pourquoi elle, une tiers-mondiste, s'est intéressée à une ville comme Lausanne. Mais auparavant, elle revient sur son choix de ne pas être dans un monastère ce qui n'est pas nouveau puisque des moines orthodoxes font comme elle en Russie. La seule différence réside dans le fait qu'elle soit une femme. Il n'est donc pas exceptionnel pour les moines ou moniales extra-muros d'aller vers les pauvres et de quitter le monastère.
00:02:40 – 00:05:27 (Séquence 2) : Mère Sofia parle de son lieu de travail, la rue. Elle sillonne les rues lausannoises pour y rencontrer les gens à aider mais ne se sent pas pour autant investie de la mission de sauver l'humanité. En 1985, elle était plutôt écrivain public et voulait aller à la Sorbonne. Mais, en se faisant assister du Padre Guiseppe pour aider les émigrés à Lausanne, un d'eux lui a fait remarquer qu'il était inadmissible que, dans la cité olympique, il y ait des pauvres. C'est ce qui a poussé Mère Sofia à explorer les rues de Lausanne et d'autres villes pour comparer les situations. Elle a rencontré ainsi les premiers de ceux qu'elle nomme les blessés de la vie et elle a été effrayée de l'ampleur de la pauvreté et de la détresse lausannoises. Elle insiste sur le fait que ce monde est totalement inconnu du grand public qui est donc incrédule. La pauvreté est bien là et a trois aspects : psychologique, spirituel et matériel. Ces trois dimensions caractérisent d'ailleurs la misère en Occident. Il paraît incroyable en 1985 de rencontrer des enfants dans la rue, mais ils sont bien là, comme elle l'a découvert avec cet émigré portugais, Joses traduit en français par le nom Jésus.
00:05:28 – 00:07:33 (Séquence 3) : Mère Sofia raconte ce dont elle a été témoin dans la rue : des gens qui n'ont pas à manger ni de lieu pour habiter et qui vivent dans l'insalubrité totale. Elle a également découvert une croissance incroyable des hépatites B et C et des gens sans soins du tout. Et en 1986, une première personne sidéenne est morte dans ses bras. Mère Sofia insiste sur le fait terrible des sidéens sans soins, avec toutes les maladies opportunistes et les complications que cela implique. Cela l'a beaucoup touchée et dans ce cas précis, elle a appelé ses amis pour soigner cet homme qui prenait des shoots d'héroïne pour se traiter. Au final, elle n'a pu qu'accompagner cette personne, dans une grande souffrance, car elle était trop mal pour être hospitalisée mais également dans l'espoir puisqu'elle a pu voir la solidarité s'établir autour d'elle. Cela l'a beaucoup marquée et indignée.
00:07:34 – 00:08:37 (Séquence 4) : Mère Sofia explique que quand elle a commencé son action sociale, il était possible de voir des gens mourir dans la rue dans le dénuement le plus complet. La situation s'est améliorée même si le nombre de marginaux augmente avec le nombre d'institutions mises en place. Pour elle, il vaut mieux s'adapter au lieu où ces gens se trouvent et faire un travail de proximité. Mais cette démarche est plutôt impopulaire en Suisse où tout doit être codifié et institutionnalisé, par exemple avec les maisons de sida. Mère Sofia prône une approche ressemblant à celle de Médecins sans frontières, MSF, mais en Suisse, et donc d'aller au-devant de la société pour la regarder, l'accompagner et l'aimer comme elle est.
00:08:39 – 00:10:15 (Séquence 5) : Mère Sofia parle des jeunes et des adultes dans la rue, qu'elle décrit comme venant parfois de milieux aisés avec des problèmes d'inceste, de viol ou de maltraitance. Ces gens automédicalisent souvent leur souffrance via la drogue, l'alcool, les médicaments ou la délinquance. Mère Sofia soulève le problème de l'école et de l'élitisme à tout prix où l'être humain, avec son propre rythme, n'a plus sa place, ce qui le marginalise. Pour elle, la valeur humaine est très importante : il faut adapter la société à elle et non l'inverse.
00:10:17 – 00:12:07 (Séquence 6) : L'interlocutrice explique toutes les activités sociales de Mère Sofia et notamment du centre d'accueil pour jeunes en difficultés qu'elle a créé : le Parachute. Il y a également le Rencard, un bus faisant de la prévention contre le sida et la toxicomanie. Mère Sofia fait distribuer le journal français des chômeurs, "Macadam", en Suisse romande par des chômeurs en fin de droit. Elle organise aussi une soupe populaire chaque hiver, sur la place Saint-Laurent, elle se porte caution pour de jeunes squatters et elle va au chevet de personnes en fin de vie. Et, depuis un an, une fondation portant son nom a été créée. L'interlocutrice demande alors à Mère Sofia si elle arrive à aider tous ceux qui se présentent à elle ou si certains sont des causes perdues. Mère Sofia répond d'abord qu'elle n'a rien fait seule : une chaîne de solidarité s'est créée autour d'elle. On ne peut en effet rien faire seul : on ne peut approcher l'Autre seul, ne serait-ce que parce qu'il s'agit de l'Autre.
00:12:10 – 00:13:41 (Séquence 7) : Mère Sofia raconte la naissance du Parachute, ce centre pour les jeunes notamment sidéens. D'ailleurs, elle refuse l'appellation de centre car il y a beaucoup de foyers, de centres et d'institutions, auxquels elle n'identifie pas le Parachute. Ce dernier est un lieu d'accueil des personnes telles qu'elles sont. On leur demande juste une motivation de départ, et même si elles ne l'ont pas, le Parachute met en place un contrat qu'elles font entièrement. Il leur sera simplement demandé d'aller jusqu'au bout de ce qu'elles ont mis sur pied elles-mêmes. Le Parachute fait appel à des gens de l'extérieur pour aider ces personnes, par exemple avec des apprentissages. Il s'agit donc d'un coup de pouce. Bien sur, il y a des échecs mais Mère Sofia refuse de les voir comme tels. Pour elle, l'échec est le fait simplement que ce n'était peut-être pas le bon moment ni la bonne structure ou les bonnes personnes. Son but est donc d'aider à trouver tous les bons éléments pour que cela marche. Il s'agit donc d'un élan de solidarité, impossible à mettre en place seul.
00:13:44 – 00:14:25 (Séquence 8) : Mère Sofia explique sa philosophie : elle essaye de transformer l'échec sans se culpabiliser soi-même. Il faut trouver les raisons externes pour ne pas se détruire en se disant qu'on ne vaut rien. Elle insiste sur le fait que chaque personne a besoin d'un cheminement particulier et que son rôle est de l'aider à le trouver, même si la réussite ne se fera pas forcément sous ses yeux.
00:14:28 – 00:16:10 (Séquence 9) : Mère Sofia parle de l'aide qu'elle offre aux démunis. Elle prône le pragmatisme, à savoir, héberger les sans-abris sans leur faire une exégèse sur le concept de la société. C'est uniquement quand la personne a reçu de quoi combler ses besoins fondamentaux qu'on peut aller plus loin. Mère Sofia prône également la prévention, notamment de la toxicomanie, de l'alcoolisme, des drames humains. Selon elle, des moyens existent, qui n'ont pas besoin d'être coûteux pour fonctionner. Ce qui coûte cher, c'est l'après, quand l'être humain a tout perdu.
00:16:14 – 00:18:44 (Séquence 10) : Mère Sofia explique que les problèmes actuels ont une source historique, notamment dans les années 1933, 1950, 1968 et 1970, qui constituent des points forts. Avant, la société était très moralisante et dure, donnant la génération de ses parents et la sienne. Puis est venu mai 1968 : l'opposé du tout interdit d'avant, qui a entraîné un laisser-faire et une démission de la famille, l'apologie de la nature ou encore l'opposition à la guerre. Ensuite, il y a eu les années 1980, celles des punks, issus de milieux aisés qu'ils rejettent, mais sans être entendus. La société en découlant s'est précarisée psychiquement, notamment avec une montée fulgurante de la toxicomanie. Mère Sofia en conclut qu'il est nécessaire de savoir dans quelle société on vit et ce qui l'a amenée. Pour elle, il faut donner un centre et des limites à l'être humain : la famille ne doit pas démissionner et l'école ne doit pas s'y substituer. Même à Lausanne, des adolescents sont dans les rues, "perdus sans collier", comme le dit le livre de Gilbert Cesbron.
00:18:48 – 00:20:35 (Séquence 11) : Mère Sofia explique que sa force lui vient de Dieu et l'anime depuis l'enfance. Dieu et la foi se vivent sans s'imposer selon elle. Les croyants sont donc des apprentis avant d'être des chrétiens, car il s'agit d'apprendre du Christ et de la Bible et de mettre en mouvement et en pratique ce qu'on a appris. Par exemple, il n'est pas aisé d'appliquer le "aimez-vous les uns les autres" ou "tu ne jugeras point". C'est donc une école et un apprentissage de tous les jours et c'est cela qui l'anime.
00:20:39 – 00:22:37 (Séquence 12) : Mère Sofia parle de sa découverte de Dieu, toute petite, notamment car son père était juif et sa mère juive puis orthodoxe. Cela l'a amenée à une prise de conscience dès l'enfance, même si elle était souvent choquée et triste de voir que les références de l'Eglise étaient des humains pouvant faillir. Mais elle a pu entrer dans la religion et lire la Bible sans dogmatisme, raison pour laquelle elle remercie son entourage de l'époque. Encore aujourd'hui, elle rejette très violemment l'endoctrinement et le dogmatisme car la foi se vit. Elle a d'ailleurs appris ceci grâce notamment à un capucin, frappé par l'épanouissement et la gentillesse de celui qui croit, mais sans être bêtifiant. Depuis ses six ans, le capucin a toujours été son point de repère.
00:22:42 – 00:24:12 (Séquence 13) : Mère Sofia parle de son rapport à la Bible, qu'elle a lue dès l'enfance, puisqu'elle ne pouvait se contenter des textes de catéchisme qu'elle trouvait "gnangnan". A sept ans, elle a donc demandé à ses parents et à un capucin un livre plus intelligent : elle s'est beaucoup épanouie grâce à la Bible. Encore aujourd'hui, ce texte reste primordial pour elle, notamment par son intégration par les chrétiens des premiers siècles qui l'ont beaucoup aidée à comprendre l'Evangile. C'est pourquoi elle réfute l'exégèse.
00:24:18 – 00:26:54 (Séquence 14) : Mère Sofia parle de son enfance et de son contact précoce avec la religion et la Bible. Elle l'a passée chez des sœurs catholiques à Fribourg, dans un internat où elle a beaucoup souffert. Elle refuse de parler de ses parents mais explique qu'en tant que fille unique d'un couple d'intellectuels, elle devait porter beaucoup. Ils étaient en fait étudiants, de philosophie et de sciences, et pas du tout préparés à avoir un enfant. Mère Sofia se dit née entre deux lits et donc préférer les écrits si tant est qu'ils soient d'origine. Elle raconte sa souffrance à l'internat, notamment à cause de l'uniformité de la pensée, dont seuls le théâtre et la musique la sortaient. Elle dit avoir eu besoin d'une famille ce que ses parents ont vite compris : pendant les vacances, ils la plaçaient dans une famille paysanne où il y avait douze enfants : ce furent les mois les plus heureux de son enfance. A tel point que quand ses parents voulaient l'emmener en voyage pour les vacances, elle les suppliait de la laisser dans cette famille où elle se réjouissait du contact avec la nature et les animaux. Pour elle, elle y était dans l'univers et le cosmos de Dieu.
00:27:00 – 00:28:00 (Séquence 15) : Mère Sofia parle de son expérience personnelle de la pauvreté puisqu'elle a vécu deux ans dans un squat, ce qui lui a permis d'entrer dans le milieu pauvre de Lausanne. Sinon elle ne l'aurait pas fait, simplement parce que son Eglise n'a pas de ministère de la pauvreté. Elle a donc dû quitter son milieu professionnel car ce n'est pas logique de travailler et de mener une vie normale en étant près des pauvres. Pendant deux ans, elle a donc vécu sans savoir où elle dormirait, se laverait, ni si elle mangerait. Si cela a été difficile à vivre, l'expérience a été très riche car cela l'a rendue plus proche des siens.
00:28:06 – 00:30:07 (Séquence 16) : Mère Sofia raconte où elle a vécu avant de venir à Lausanne. Elle a fait le tour du monde, en Asie notamment, en Inde et en Afghanistan, où elle voulait aider les gens avec ses amis mais toujours en s'adaptant aux moyens, notamment médicaux, locaux. Ensuite, elle a été à Montréal, où elle a fini sa licence en psychologie. Elle a fait ses études de théologie en Angleterre, à Oxford. Mère Sofia a également été en Finlande et en Suède pour voir comment ces pays approchent le social : ils ont 20 ans d'avance sur les autres.
00:30:14 – 00:33:31 (Séquence 17) : Mère Sofia parle de ses études comme infirmière en psychologie et en théologie. Elle a fait infirmière pour ne pas rester intellectuelle après sa maturité : elle voulait quelque chose de pragmatique et pratique. Grâce à cette profession, elle a pu aller au Brésil et dans d'autres pays. Puis elle a réalisé qu'il lui manquait un bagage psychologique et elle s'est orientée dans des études plus théoriques et conceptuelles. Pour autant, ce bagage-ci n'est pas fondamental mais plutôt un canevas ou un guide pour conduire sa profession. Elle insiste sur le danger de la psychologie qui tend à étiqueter les gens. Mère Sofia en conclut que pour faire des études, il faut une sagesse d'humilité pour se débarrasser de l'ego et de l'orgueil amenés par l'accumulation des savoirs. Les études présentent donc une dualité et pour elle, la psychologie est comme un accident de parcours qui a menacé son écologie mentale en la poussant à étudier et à cataloguer tout le monde.
00:33:39 – 00:35:06 (Séquence 18) : Mère Sofia raconte la façon dont elle est devenue moniale, soit moine au féminin. Elle dit avoir été attirée un temps par la vie au monastère et avoir le goût de se retirer, notamment car le Christ l'a fait également, pendant 40 jours. Mais il est possible, par vocation, de vivre une vie de monastère au quotidien sans y être. Pour elle les gens qui ont la vocation et qui sont dans les monastères sont les poumons de l'Eglise. En ce qui la concerne, elle a eu la vocation mais pas au point de rester toujours, car elle a besoin de bouger : être moniale et dans le monde n'est pas incompatible pour elle. Mais, elle a passé un temps en monastère et faisait beaucoup rire les moniales et l'abbesse : elle était trop clown pour rester.
00:35:14 – 00:36:30 (Séquence 19) : Mère Sofia parle des voeux qu'elle a prononcés en 1985 et qui consistent à consacrer sa vie à Dieu. En orthodoxie, si on n'est plus en paix avec soi-même, on peut aller voir son référent et changer de vie. Donc l'orthodoxie orientale n'est pas si dure que l'on croit et repose sur le principe de faire ce qui est bon pour soi.
00:36:38 – 00:37:41 (Séquence 20) : Mère Sofia parle de son choix entre judaïsme – incarné par une partie de sa famille – et orthodoxie. Cela lui a été très difficile car elle aime beaucoup le judaïsme, la religion du Christ selon elle. Elle ne comprend d'ailleurs pas comment on a pu bafouer autant de gens au nom de cette religion, qui est celle du Christ et de l'amour. A 18 ans, elle voulait donc choisir cette religion mais les Juifs attendent le Messie. Or, elle pensait l'avoir déjà rencontré via sa confession et ne voulait pas renier cela : elle a donc choisi l'orthodoxie par amour pour Jésus ressuscité. Ceci ne l'empêche pas d'aller réciter le Shabbat Shalom de temps en temps avec la communauté israélite de Lausanne.
00:37:50 – 00:40:12 (Séquence 21) : Mère Sofia explique son regard critique sur les églises, qu'elle précise comme étant constructif. Elle estime que l'Eglise ne joue pas assez son rôle d'aide aux démunis, notamment les chômeurs. Elle voit l'Eglise comme devant être une communauté généreuse qui accueillerait en son sein les blessés de la vie. Il est en effet frappant de constater que ces gens-là ne vont plus au culte ou à la messe car ils ne se sentent pas à l'aise. Or, c'est le rôle de l'Eglise de redonner sa citoyenneté à tout le monde, au sein de l'Eglise, notamment en apportant quelques réponses au chômage. Pour Mère Sofia, l'Eglise doit s'intégrer entièrement dans la société, comme dans le temps où les premiers chrétiens aidaient les paysans aux champs. Elle estime que les religieux ne doivent plus avoir ce statut très spécial pour se mettre à travailler avec les gens. Elle en veut pour preuve le fait que le Christ ait bâti son Eglise sur la foi et non sur une institution. Le christianisme n'est pas une religion car le Christ n'en a pas créé d'autre puisqu'il est resté juif jusqu'au bout et a instauré une communauté et une Eglise sur l'amour et la coresponsabilité universels. Ceci implique donc que chacun doit aider et trouver des solutions, notamment pour les chômeurs et les sans-abri. Pour Mère Sofia, ceci est la vraie Eglise.
00:40:22 – 00:44:32 (Séquence 22) : L'interlocutrice demande à Mère Sofia si elle se sent personnellement responsable de tout ce qui se passe dans le monde. Mère Sofia répond qu'on est tous des citoyens et des enfants du monde. De fait, elle ne peut se cantonner à la Suisse. Pour elle, la querelle aux étrangers est un faux débat puisque nous sommes tous concernés par ce qui se passe ailleurs. Diverses réactions sont possibles : la culpabilisation, l'action ou encore les jumelages entre différents lieux du monde, pour amener notre "trop de choses" à ceux qui n'ont rien. Mère Sofia – de même que les diplomates du pays – refuse qu'un quart du monde affame les trois quarts restants, un état de fait pourtant scientifiquement prouvé actuellement mais qui n'est pas digne des humains. Pour elle, un humain qui ne se sent pas responsable des autres souffre de déficience. Et, contrairement à ce que l'on peut penser, les résultats sont perceptibles : par exemple en Bosnie, au Rwanda, la situation s'améliore peu à peu. Parfois on a l'impression de repartir de zéro, avec par exemple le Zaïre et ce million de gens exilés sur une montagne sans boire ni manger. Mère Sofia se dit révoltée et furieuse de ce genre de situation mais elle se force à réfléchir à ce que l'on peut faire pour agir, à notre niveau et ensemble. Elle prône l'ingérence dans les pays en détresse comme un acte civique de la part de citoyens du monde envers d'autres citoyens du monde. Elle réfute donc la notion de frontières et raconte une anecdote à ce sujet. A 15 ans elle a fait peur à son père en voulant brûler son passeport car elle avait pris conscience de son importance dans la guerre. Aujourd'hui encore, son passeport ne signifie rien pour elle : il n'y a plus de frontières. Et même si cette philosophie n'a que peu de résultats, elle estime que cette petite goutte va s'ajouter aux autres pour avancer la situation du monde. Elle cite notamment comme phares dans le monde, Sœur Emmanuelle et Mère Teresa, l'Abbé Pierre, le Dalaï-lama, qui approchent le commun des mortels de Dieu.
00:44:42 – 00:46:55 (Séquence 23) : Mère Sofia parle de son expérience personnelle de Dieu, ancrée dans un moment de très grande révolte où un bébé est mort dans ses bras en Inde. Elle était effondrée de voir tous ces enfants mourir de faim et de soif et celui-ci en particulier car elle était arrivée trop tard pour le perfuser. Elle pleurait et hurlait intérieurement pour demander pourquoi à Dieu, jusqu'à ce qu'un grand calme l'envahisse et qu'elle comprenne que cet ange retournait en fait vers Dieu. La mère de l'enfant est alors venue avec une robe qu'elle avait faite pour la lui offrir. C'est à travers cette femme que Mère Sofia a vu l'acte de Dieu. Une autre expérience a été un jeune homme mort du sida dans ses bras, pendant la semaine sainte. Avant de mourir et alors qu'il était trop faible pour se mouvoir et qu'il n'était pas accompagné spirituellement, il s'est pourtant levé et a reproduit la Cène après avoir dit un Notre Père avec Mère Sofia. Cela a constitué la plus belle expérience mystique de Mère Sofia : pour elle, le Christ était là.
00:47:05 – 00:47:45 (Séquence 24) : Mère Sofia explique que Dieu est présent pour elle, même si certains moments sont durs, notamment du fait de la maladie. Mais elle refuse de se voir en victime ou en martyr car il s'agit d'une épreuve parmi d'autres et qui sert à avancer. Elle se dit unie et proche des gens, plus que jamais, maintenant qu'elle est malade et qu'elle ne fait plus d'accompagnement.
00:47:56 – 00:48:19 (Séquence 25) : Générique de fin du Plans-Fixes consacré à Mère Sofia, psychologue, théologienne et aumônière de rue, tourné à Lausanne le 29 septembre 1995.
Lien aux découpage sur la base de données original
00:00:00 – 00:00:22 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Mère Sofia, psychologue, théologienne et aumônière de rue, tourné à Lausanne le 29 septembre 1995. L'interlocutrice est Dominique Jaccard.
00:00:22 – 00:02:39 (Séquence 1) : L'interlocutrice explique que Mère Sofia est une religieuse orthodoxe qui ne vit pourtant pas dans un monastère mais dans un petit appartement au centre de Lausanne. Depuis 1985, elle exerce son ministère dans la rue qui représente pour elle un océan universitaire. La rue est pour Mère Sofia un lieu de rencontres, notamment de personnes qu'elle décrit comme blessées par la vie. Elle parle d'une société marginalisée, fracturée de la société lausannoise, et dit vouloir expliquer pourquoi elle, une tiers-mondiste, s'est intéressée à une ville comme Lausanne. Mais auparavant, elle revient sur son choix de ne pas être dans un monastère ce qui n'est pas nouveau puisque des moines orthodoxes font comme elle en Russie. La seule différence réside dans le fait qu'elle soit une femme. Il n'est donc pas exceptionnel pour les moines ou moniales extra-muros d'aller vers les pauvres et de quitter le monastère.
00:02:40 – 00:05:27 (Séquence 2) : Mère Sofia parle de son lieu de travail, la rue. Elle sillonne les rues lausannoises pour y rencontrer les gens à aider mais ne se sent pas pour autant investie de la mission de sauver l'humanité. En 1985, elle était plutôt écrivain public et voulait aller à la Sorbonne. Mais, en se faisant assister du Padre Guiseppe pour aider les émigrés à Lausanne, un d'eux lui a fait remarquer qu'il était inadmissible que, dans la cité olympique, il y ait des pauvres. C'est ce qui a poussé Mère Sofia à explorer les rues de Lausanne et d'autres villes pour comparer les situations. Elle a rencontré ainsi les premiers de ceux qu'elle nomme les blessés de la vie et elle a été effrayée de l'ampleur de la pauvreté et de la détresse lausannoises. Elle insiste sur le fait que ce monde est totalement inconnu du grand public qui est donc incrédule. La pauvreté est bien là et a trois aspects : psychologique, spirituel et matériel. Ces trois dimensions caractérisent d'ailleurs la misère en Occident. Il paraît incroyable en 1985 de rencontrer des enfants dans la rue, mais ils sont bien là, comme elle l'a découvert avec cet émigré portugais, Joses traduit en français par le nom Jésus.
00:05:28 – 00:07:33 (Séquence 3) : Mère Sofia raconte ce dont elle a été témoin dans la rue : des gens qui n'ont pas à manger ni de lieu pour habiter et qui vivent dans l'insalubrité totale. Elle a également découvert une croissance incroyable des hépatites B et C et des gens sans soins du tout. Et en 1986, une première personne sidéenne est morte dans ses bras. Mère Sofia insiste sur le fait terrible des sidéens sans soins, avec toutes les maladies opportunistes et les complications que cela implique. Cela l'a beaucoup touchée et dans ce cas précis, elle a appelé ses amis pour soigner cet homme qui prenait des shoots d'héroïne pour se traiter. Au final, elle n'a pu qu'accompagner cette personne, dans une grande souffrance, car elle était trop mal pour être hospitalisée mais également dans l'espoir puisqu'elle a pu voir la solidarité s'établir autour d'elle. Cela l'a beaucoup marquée et indignée.
00:07:34 – 00:08:37 (Séquence 4) : Mère Sofia explique que quand elle a commencé son action sociale, il était possible de voir des gens mourir dans la rue dans le dénuement le plus complet. La situation s'est améliorée même si le nombre de marginaux augmente avec le nombre d'institutions mises en place. Pour elle, il vaut mieux s'adapter au lieu où ces gens se trouvent et faire un travail de proximité. Mais cette démarche est plutôt impopulaire en Suisse où tout doit être codifié et institutionnalisé, par exemple avec les maisons de sida. Mère Sofia prône une approche ressemblant à celle de Médecins sans frontières, MSF, mais en Suisse, et donc d'aller au-devant de la société pour la regarder, l'accompagner et l'aimer comme elle est.
00:08:39 – 00:10:15 (Séquence 5) : Mère Sofia parle des jeunes et des adultes dans la rue, qu'elle décrit comme venant parfois de milieux aisés avec des problèmes d'inceste, de viol ou de maltraitance. Ces gens automédicalisent souvent leur souffrance via la drogue, l'alcool, les médicaments ou la délinquance. Mère Sofia soulève le problème de l'école et de l'élitisme à tout prix où l'être humain, avec son propre rythme, n'a plus sa place, ce qui le marginalise. Pour elle, la valeur humaine est très importante : il faut adapter la société à elle et non l'inverse.
00:10:17 – 00:12:07 (Séquence 6) : L'interlocutrice explique toutes les activités sociales de Mère Sofia et notamment du centre d'accueil pour jeunes en difficultés qu'elle a créé : le Parachute. Il y a également le Rencard, un bus faisant de la prévention contre le sida et la toxicomanie. Mère Sofia fait distribuer le journal français des chômeurs, "Macadam", en Suisse romande par des chômeurs en fin de droit. Elle organise aussi une soupe populaire chaque hiver, sur la place Saint-Laurent, elle se porte caution pour de jeunes squatters et elle va au chevet de personnes en fin de vie. Et, depuis un an, une fondation portant son nom a été créée. L'interlocutrice demande alors à Mère Sofia si elle arrive à aider tous ceux qui se présentent à elle ou si certains sont des causes perdues. Mère Sofia répond d'abord qu'elle n'a rien fait seule : une chaîne de solidarité s'est créée autour d'elle. On ne peut en effet rien faire seul : on ne peut approcher l'Autre seul, ne serait-ce que parce qu'il s'agit de l'Autre.
00:12:10 – 00:13:41 (Séquence 7) : Mère Sofia raconte la naissance du Parachute, ce centre pour les jeunes notamment sidéens. D'ailleurs, elle refuse l'appellation de centre car il y a beaucoup de foyers, de centres et d'institutions, auxquels elle n'identifie pas le Parachute. Ce dernier est un lieu d'accueil des personnes telles qu'elles sont. On leur demande juste une motivation de départ, et même si elles ne l'ont pas, le Parachute met en place un contrat qu'elles font entièrement. Il leur sera simplement demandé d'aller jusqu'au bout de ce qu'elles ont mis sur pied elles-mêmes. Le Parachute fait appel à des gens de l'extérieur pour aider ces personnes, par exemple avec des apprentissages. Il s'agit donc d'un coup de pouce. Bien sur, il y a des échecs mais Mère Sofia refuse de les voir comme tels. Pour elle, l'échec est le fait simplement que ce n'était peut-être pas le bon moment ni la bonne structure ou les bonnes personnes. Son but est donc d'aider à trouver tous les bons éléments pour que cela marche. Il s'agit donc d'un élan de solidarité, impossible à mettre en place seul.
00:13:44 – 00:14:25 (Séquence 8) : Mère Sofia explique sa philosophie : elle essaye de transformer l'échec sans se culpabiliser soi-même. Il faut trouver les raisons externes pour ne pas se détruire en se disant qu'on ne vaut rien. Elle insiste sur le fait que chaque personne a besoin d'un cheminement particulier et que son rôle est de l'aider à le trouver, même si la réussite ne se fera pas forcément sous ses yeux.
00:14:28 – 00:16:10 (Séquence 9) : Mère Sofia parle de l'aide qu'elle offre aux démunis. Elle prône le pragmatisme, à savoir, héberger les sans-abris sans leur faire une exégèse sur le concept de la société. C'est uniquement quand la personne a reçu de quoi combler ses besoins fondamentaux qu'on peut aller plus loin. Mère Sofia prône également la prévention, notamment de la toxicomanie, de l'alcoolisme, des drames humains. Selon elle, des moyens existent, qui n'ont pas besoin d'être coûteux pour fonctionner. Ce qui coûte cher, c'est l'après, quand l'être humain a tout perdu.
00:16:14 – 00:18:44 (Séquence 10) : Mère Sofia explique que les problèmes actuels ont une source historique, notamment dans les années 1933, 1950, 1968 et 1970, qui constituent des points forts. Avant, la société était très moralisante et dure, donnant la génération de ses parents et la sienne. Puis est venu mai 1968 : l'opposé du tout interdit d'avant, qui a entraîné un laisser-faire et une démission de la famille, l'apologie de la nature ou encore l'opposition à la guerre. Ensuite, il y a eu les années 1980, celles des punks, issus de milieux aisés qu'ils rejettent, mais sans être entendus. La société en découlant s'est précarisée psychiquement, notamment avec une montée fulgurante de la toxicomanie. Mère Sofia en conclut qu'il est nécessaire de savoir dans quelle société on vit et ce qui l'a amenée. Pour elle, il faut donner un centre et des limites à l'être humain : la famille ne doit pas démissionner et l'école ne doit pas s'y substituer. Même à Lausanne, des adolescents sont dans les rues, "perdus sans collier", comme le dit le livre de Gilbert Cesbron.
00:18:48 – 00:20:35 (Séquence 11) : Mère Sofia explique que sa force lui vient de Dieu et l'anime depuis l'enfance. Dieu et la foi se vivent sans s'imposer selon elle. Les croyants sont donc des apprentis avant d'être des chrétiens, car il s'agit d'apprendre du Christ et de la Bible et de mettre en mouvement et en pratique ce qu'on a appris. Par exemple, il n'est pas aisé d'appliquer le "aimez-vous les uns les autres" ou "tu ne jugeras point". C'est donc une école et un apprentissage de tous les jours et c'est cela qui l'anime.
00:20:39 – 00:22:37 (Séquence 12) : Mère Sofia parle de sa découverte de Dieu, toute petite, notamment car son père était juif et sa mère juive puis orthodoxe. Cela l'a amenée à une prise de conscience dès l'enfance, même si elle était souvent choquée et triste de voir que les références de l'Eglise étaient des humains pouvant faillir. Mais elle a pu entrer dans la religion et lire la Bible sans dogmatisme, raison pour laquelle elle remercie son entourage de l'époque. Encore aujourd'hui, elle rejette très violemment l'endoctrinement et le dogmatisme car la foi se vit. Elle a d'ailleurs appris ceci grâce notamment à un capucin, frappé par l'épanouissement et la gentillesse de celui qui croit, mais sans être bêtifiant. Depuis ses six ans, le capucin a toujours été son point de repère.
00:22:42 – 00:24:12 (Séquence 13) : Mère Sofia parle de son rapport à la Bible, qu'elle a lue dès l'enfance, puisqu'elle ne pouvait se contenter des textes de catéchisme qu'elle trouvait "gnangnan". A sept ans, elle a donc demandé à ses parents et à un capucin un livre plus intelligent : elle s'est beaucoup épanouie grâce à la Bible. Encore aujourd'hui, ce texte reste primordial pour elle, notamment par son intégration par les chrétiens des premiers siècles qui l'ont beaucoup aidée à comprendre l'Evangile. C'est pourquoi elle réfute l'exégèse.
00:24:18 – 00:26:54 (Séquence 14) : Mère Sofia parle de son enfance et de son contact précoce avec la religion et la Bible. Elle l'a passée chez des sœurs catholiques à Fribourg, dans un internat où elle a beaucoup souffert. Elle refuse de parler de ses parents mais explique qu'en tant que fille unique d'un couple d'intellectuels, elle devait porter beaucoup. Ils étaient en fait étudiants, de philosophie et de sciences, et pas du tout préparés à avoir un enfant. Mère Sofia se dit née entre deux lits et donc préférer les écrits si tant est qu'ils soient d'origine. Elle raconte sa souffrance à l'internat, notamment à cause de l'uniformité de la pensée, dont seuls le théâtre et la musique la sortaient. Elle dit avoir eu besoin d'une famille ce que ses parents ont vite compris : pendant les vacances, ils la plaçaient dans une famille paysanne où il y avait douze enfants : ce furent les mois les plus heureux de son enfance. A tel point que quand ses parents voulaient l'emmener en voyage pour les vacances, elle les suppliait de la laisser dans cette famille où elle se réjouissait du contact avec la nature et les animaux. Pour elle, elle y était dans l'univers et le cosmos de Dieu.
00:27:00 – 00:28:00 (Séquence 15) : Mère Sofia parle de son expérience personnelle de la pauvreté puisqu'elle a vécu deux ans dans un squat, ce qui lui a permis d'entrer dans le milieu pauvre de Lausanne. Sinon elle ne l'aurait pas fait, simplement parce que son Eglise n'a pas de ministère de la pauvreté. Elle a donc dû quitter son milieu professionnel car ce n'est pas logique de travailler et de mener une vie normale en étant près des pauvres. Pendant deux ans, elle a donc vécu sans savoir où elle dormirait, se laverait, ni si elle mangerait. Si cela a été difficile à vivre, l'expérience a été très riche car cela l'a rendue plus proche des siens.
00:28:06 – 00:30:07 (Séquence 16) : Mère Sofia raconte où elle a vécu avant de venir à Lausanne. Elle a fait le tour du monde, en Asie notamment, en Inde et en Afghanistan, où elle voulait aider les gens avec ses amis mais toujours en s'adaptant aux moyens, notamment médicaux, locaux. Ensuite, elle a été à Montréal, où elle a fini sa licence en psychologie. Elle a fait ses études de théologie en Angleterre, à Oxford. Mère Sofia a également été en Finlande et en Suède pour voir comment ces pays approchent le social : ils ont 20 ans d'avance sur les autres.
00:30:14 – 00:33:31 (Séquence 17) : Mère Sofia parle de ses études comme infirmière en psychologie et en théologie. Elle a fait infirmière pour ne pas rester intellectuelle après sa maturité : elle voulait quelque chose de pragmatique et pratique. Grâce à cette profession, elle a pu aller au Brésil et dans d'autres pays. Puis elle a réalisé qu'il lui manquait un bagage psychologique et elle s'est orientée dans des études plus théoriques et conceptuelles. Pour autant, ce bagage-ci n'est pas fondamental mais plutôt un canevas ou un guide pour conduire sa profession. Elle insiste sur le danger de la psychologie qui tend à étiqueter les gens. Mère Sofia en conclut que pour faire des études, il faut une sagesse d'humilité pour se débarrasser de l'ego et de l'orgueil amenés par l'accumulation des savoirs. Les études présentent donc une dualité et pour elle, la psychologie est comme un accident de parcours qui a menacé son écologie mentale en la poussant à étudier et à cataloguer tout le monde.
00:33:39 – 00:35:06 (Séquence 18) : Mère Sofia raconte la façon dont elle est devenue moniale, soit moine au féminin. Elle dit avoir été attirée un temps par la vie au monastère et avoir le goût de se retirer, notamment car le Christ l'a fait également, pendant 40 jours. Mais il est possible, par vocation, de vivre une vie de monastère au quotidien sans y être. Pour elle les gens qui ont la vocation et qui sont dans les monastères sont les poumons de l'Eglise. En ce qui la concerne, elle a eu la vocation mais pas au point de rester toujours, car elle a besoin de bouger : être moniale et dans le monde n'est pas incompatible pour elle. Mais, elle a passé un temps en monastère et faisait beaucoup rire les moniales et l'abbesse : elle était trop clown pour rester.
00:35:14 – 00:36:30 (Séquence 19) : Mère Sofia parle des voeux qu'elle a prononcés en 1985 et qui consistent à consacrer sa vie à Dieu. En orthodoxie, si on n'est plus en paix avec soi-même, on peut aller voir son référent et changer de vie. Donc l'orthodoxie orientale n'est pas si dure que l'on croit et repose sur le principe de faire ce qui est bon pour soi.
00:36:38 – 00:37:41 (Séquence 20) : Mère Sofia parle de son choix entre judaïsme – incarné par une partie de sa famille – et orthodoxie. Cela lui a été très difficile car elle aime beaucoup le judaïsme, la religion du Christ selon elle. Elle ne comprend d'ailleurs pas comment on a pu bafouer autant de gens au nom de cette religion, qui est celle du Christ et de l'amour. A 18 ans, elle voulait donc choisir cette religion mais les Juifs attendent le Messie. Or, elle pensait l'avoir déjà rencontré via sa confession et ne voulait pas renier cela : elle a donc choisi l'orthodoxie par amour pour Jésus ressuscité. Ceci ne l'empêche pas d'aller réciter le Shabbat Shalom de temps en temps avec la communauté israélite de Lausanne.
00:37:50 – 00:40:12 (Séquence 21) : Mère Sofia explique son regard critique sur les églises, qu'elle précise comme étant constructif. Elle estime que l'Eglise ne joue pas assez son rôle d'aide aux démunis, notamment les chômeurs. Elle voit l'Eglise comme devant être une communauté généreuse qui accueillerait en son sein les blessés de la vie. Il est en effet frappant de constater que ces gens-là ne vont plus au culte ou à la messe car ils ne se sentent pas à l'aise. Or, c'est le rôle de l'Eglise de redonner sa citoyenneté à tout le monde, au sein de l'Eglise, notamment en apportant quelques réponses au chômage. Pour Mère Sofia, l'Eglise doit s'intégrer entièrement dans la société, comme dans le temps où les premiers chrétiens aidaient les paysans aux champs. Elle estime que les religieux ne doivent plus avoir ce statut très spécial pour se mettre à travailler avec les gens. Elle en veut pour preuve le fait que le Christ ait bâti son Eglise sur la foi et non sur une institution. Le christianisme n'est pas une religion car le Christ n'en a pas créé d'autre puisqu'il est resté juif jusqu'au bout et a instauré une communauté et une Eglise sur l'amour et la coresponsabilité universels. Ceci implique donc que chacun doit aider et trouver des solutions, notamment pour les chômeurs et les sans-abri. Pour Mère Sofia, ceci est la vraie Eglise.
00:40:22 – 00:44:32 (Séquence 22) : L'interlocutrice demande à Mère Sofia si elle se sent personnellement responsable de tout ce qui se passe dans le monde. Mère Sofia répond qu'on est tous des citoyens et des enfants du monde. De fait, elle ne peut se cantonner à la Suisse. Pour elle, la querelle aux étrangers est un faux débat puisque nous sommes tous concernés par ce qui se passe ailleurs. Diverses réactions sont possibles : la culpabilisation, l'action ou encore les jumelages entre différents lieux du monde, pour amener notre "trop de choses" à ceux qui n'ont rien. Mère Sofia – de même que les diplomates du pays – refuse qu'un quart du monde affame les trois quarts restants, un état de fait pourtant scientifiquement prouvé actuellement mais qui n'est pas digne des humains. Pour elle, un humain qui ne se sent pas responsable des autres souffre de déficience. Et, contrairement à ce que l'on peut penser, les résultats sont perceptibles : par exemple en Bosnie, au Rwanda, la situation s'améliore peu à peu. Parfois on a l'impression de repartir de zéro, avec par exemple le Zaïre et ce million de gens exilés sur une montagne sans boire ni manger. Mère Sofia se dit révoltée et furieuse de ce genre de situation mais elle se force à réfléchir à ce que l'on peut faire pour agir, à notre niveau et ensemble. Elle prône l'ingérence dans les pays en détresse comme un acte civique de la part de citoyens du monde envers d'autres citoyens du monde. Elle réfute donc la notion de frontières et raconte une anecdote à ce sujet. A 15 ans elle a fait peur à son père en voulant brûler son passeport car elle avait pris conscience de son importance dans la guerre. Aujourd'hui encore, son passeport ne signifie rien pour elle : il n'y a plus de frontières. Et même si cette philosophie n'a que peu de résultats, elle estime que cette petite goutte va s'ajouter aux autres pour avancer la situation du monde. Elle cite notamment comme phares dans le monde, Sœur Emmanuelle et Mère Teresa, l'Abbé Pierre, le Dalaï-lama, qui approchent le commun des mortels de Dieu.
00:44:42 – 00:46:55 (Séquence 23) : Mère Sofia parle de son expérience personnelle de Dieu, ancrée dans un moment de très grande révolte où un bébé est mort dans ses bras en Inde. Elle était effondrée de voir tous ces enfants mourir de faim et de soif et celui-ci en particulier car elle était arrivée trop tard pour le perfuser. Elle pleurait et hurlait intérieurement pour demander pourquoi à Dieu, jusqu'à ce qu'un grand calme l'envahisse et qu'elle comprenne que cet ange retournait en fait vers Dieu. La mère de l'enfant est alors venue avec une robe qu'elle avait faite pour la lui offrir. C'est à travers cette femme que Mère Sofia a vu l'acte de Dieu. Une autre expérience a été un jeune homme mort du sida dans ses bras, pendant la semaine sainte. Avant de mourir et alors qu'il était trop faible pour se mouvoir et qu'il n'était pas accompagné spirituellement, il s'est pourtant levé et a reproduit la Cène après avoir dit un Notre Père avec Mère Sofia. Cela a constitué la plus belle expérience mystique de Mère Sofia : pour elle, le Christ était là.
00:47:05 – 00:47:45 (Séquence 24) : Mère Sofia explique que Dieu est présent pour elle, même si certains moments sont durs, notamment du fait de la maladie. Mais elle refuse de se voir en victime ou en martyr car il s'agit d'une épreuve parmi d'autres et qui sert à avancer. Elle se dit unie et proche des gens, plus que jamais, maintenant qu'elle est malade et qu'elle ne fait plus d'accompagnement.
00:47:56 – 00:48:19 (Séquence 25) : Générique de fin du Plans-Fixes consacré à Mère Sofia, psychologue, théologienne et aumônière de rue, tourné à Lausanne le 29 septembre 1995.
Lien aux découpage sur la base de données original
Questo documento è stato salvaguardato con il sostegno di Memoriav.
304 Documenti in collezione
Avete domande o osservazioni su questo oggetto?
Feedback a noi