Jacques Neirynck (Professeur, écrivain et homme politique)

  • français
  • 2006-08-28
  • Durata: 00:48:00

Die unten dargestellten Filmaufnahmen werden Ihnen über Vimeo (https://vimeo.com/) zur Konsultation angeboten.

Descrizione

Né en 1931 à Bruxelles, J. Neirynck a vécu, dans sa jeunesse, deux épisodes fondateurs pour une prise de conscience politique : l'occupation allemande et la décolonisation du Congo belge. La tradition familiale et son éducation dans des collèges catholiques, ainsi qu'à l'Université de Louvain lui forgent une structure d'esprit et lui permettent de donner un sens à sa vie. C'est ce qui motivera plus tard son engagement politique au PDC. Malgré son penchant pour la littérature, il devient ingénieur en électricité. En 1972, il est nommé professeur à l'EPFL et s'installe en Suisse avec sa famille. Il écrit de nombreux ouvrages techniques, pourtant son goût pour l'écriture ne l'a pas quitté et c'est avec jubilation qu'il publie plusieurs romans. Boulimique, il veut tout essayer, tout tenter, aspirer le monde et vivre pleinement.

00:00:00 – 00:00:10 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Jacques Neirynck, professeur, écrivain et homme politique, et tourné à Ecublens le 28 août 2006. L'interlocuteur est Pascal Décaillet.
00:00:10 – 00:01:07 (Séquence 1) : L'interlocuteur Pascal Décaillet présente son invité Jacques Neirynck. Il a publié des livres techniques tels que "Circuits non linéaires", le "Traité de l'électricité", des romans tels que "Le manuscrit du Saint-Sépulcre,", "La prophétie du Vatican" et des essais. Dans ses écrits, Jacques Neirynck voyage dans un univers entre la fiction et le réel, entre le rêve et la rigueur scientifique. Jacques Neirynck est né en Belgique en 1931. Il a vu les horreurs du nazisme. Il s'est engagé dans le monde politique et spirituel. L'entretien de Jacques Neirynck se déroule chez lui à Ecublens.
00:01:08 – 00:01:16 (Séquence 2) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Jacques Neirynck, professeur, écrivain et homme politique, et tourné à Ecublens le 28 août 2006. L'interlocuteur est Pascal Décaillet.
00:01:18 – 00:02:31 (Séquence 3) : Jacques Neirynck est né en Belgique en 1931. Il est invité à parler du plus ancien souvenir qu'il a gardé de son pays natal. Il se souvient exactement du 22 août 1934, date de naissance de son frère. Il était âgé de 3 ans. On lui avait raconté que sa mère était allée le chercher sur un bateau. L’interlocuteur demande à Jacques Neirynck quel est son rapport au passé et à la mémoire. Il se souvient essentiellement des événements qui l'ont touché et a oublié ce qui ne l'a pas marqué.
00:02:33 – 00:03:09 (Séquence 4) : Jacques Neirynck a plusieurs nationalités : il est belge, français et suisse. Pour lui, être belge, c'est une absence de nationalité. Il explique que le pays a été fabriqué artificiellement au Congrès de Vienne en 1815. Il compare la situation du pays au rassemblement des Tchèques et des Slovaques et à celui des gens de la Yougoslavie. Il pense que c'est un pays qui est voué à se défaire.
00:03:12 – 00:03:55 (Séquence 5) : Dans le bureau de Jacques Neirynck de sa maison d'Ecublens, deux cartes de Bruxelles sont affichées : l'une d’elles représente la ville ancienne et l'autre présente celle d'aujourd'hui. Il se définit comme un citadin et explique qu'il est attaché à sa ville natale. Ses ancêtres sont flamands. Il parle français. Il a beaucoup d'estime pour la Flandre et il espère qu'elle deviendra indépendante.
00:03:58 – 00:04:24 (Séquence 6) : Jacques Neirynck a connu Jacques Brel à l'école. Il se souvient seulement que Jacques Brel avait fumé aux toilettes et que le père-préfet l'avait expulsé. La première image qu'il a de lui est donc déjà celle d'un rebelle.
00:04:28 – 00:05:14 (Séquence 7) : Jacques Neirynck a vécu l'attaque allemande du 10 mai 1940. Il garde de cette date un souvenir gustatif : le chocolat chaud qu'il a bu. Il explique qu'il n'y avait plus de gaz ni d'électricité. Son père était à l'armée et sa mère était enceinte. Son grand-père, inventif, avait fait un feu dans la cour avec des débris de caisses sur lequel il avait chauffé du chocolat.
00:05:18 – 00:06:42 (Séquence 8) : Jacques Neirynck est un intellectuel, un scientifique. Il a coordonné un traité d'électricité et écrit de nombreux livres. L'interlocuteur l'invite à parler de la période du nazisme et de l'occupation de la Belgique. Il a d'abord considéré l'armée allemande comme quelque chose de bien : elle lui semblait ordonnée, propre, efficace et correcte. Ce sentiment a basculé en octobre 1942, lorsqu'en Belgique on a commencé à faire porter l'étoile de David aux Juifs. Il se souvient qu'un jour deux hommes de la Gestapo sont entrés dans la classe d'école et qu'ils ont emporté deux enfants juifs, qui étaient cachés dans l’école, et deux professeurs qui étaient des prêtres. Ils ont été exécutés quinze jours plus tard. Jacques Neirynck avait 11 ans au moment de cet événement qui marque sa première prise de conscience politique. Jacques Neirynck réagit quasi instinctivement contre tout ce qui est du nationalisme, du populisme ou de l'extrémisme.
00:06:47 – 00:07:36 (Séquence 9) : Jacques Neirynck a été Conseiller national entre 1999 et 2003. Il est démocrate-chrétien. Ses parents appartenaient au même parti quand ils vivaient en Belgique. Il le désigne comme un parti centriste, un peu conservateur et intransigeant sur certaines valeurs. Le parti est venu le chercher pour remplacer Jean-Charles Simon. Il explique que c'est par hasard qu’il s'est inscrit dans ce parti et pense aussi que c'est par hasard qu'il a été élu.
00:07:41 – 00:10:07 (Séquence 10) : Jacques Neirynck a été un jeune bachelier. Il a commencé des études universitaires à 16 ans. L'interlocuteur parle de l'homme de science, le professeur, et de l'homme dans la cité, le politicien. Jacques Neirynck a été envoyé en tant qu'ingénieur au Zaïre, appelé à cette époque le Congo belge. Il dit l’avoir vécu comme "Tintin au Congo". Tintin est son modèle. Il s’est rendu dans ce pays dans le but d’apporter le bien-être et la bonne parole. Le 1er janvier 1957, il a donné sa première leçon d'ingénieur en Afrique noire. Il a découvert Léopoldville qui est devenu Kinshasa. Il dit que "tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes". On demande à Jacques Neirynck s'il s'est senti investi d'une mission civilisatrice. Il explique qu'il n'y avait pas d'universitaires. Il pense que si une génération entière avait pu recevoir une instruction universitaire comme ce fut le cas en Afrique du Sud, il n'y aurait pas eu par la suite de problèmes. Il explique que les Anglais et les Français ont effectué une décolonisation plus lente que la Belgique. Et celle-ci n'a pas envoyé l'armée. La décolonisation du Congo a été rapide, la Belgique a tout abandonné pendant les six premiers mois de l'année 1960. Il précise qu'il ne souhaite pas dire que la colonisation était une bonne chose, mais il pense qu'il aurait fallu arriver au bout du projet.
00:10:12 – 00:10:32 (Séquence 11) : Jacques Neirynck a 75 ans. La politique l'occupe encore. Le nazisme et la décolonisation lui ont fait prendre conscience que s'il ne s'occupait pas de la politique, celle-ci s'occupait de lui.
00:10:38 – 00:11:52 (Séquence 12) : Jacques Neirynck s'est occupé d'une commission chargée des OGM – des organismes génétiquement modifiés. On l'interroge sur le rapport entre le progrès et la politique. Il explique que le travail intéressant s'effectue en commission, car le plénum est purement formel. Pour cette commission, il y a eu 23 séances pour discuter des 31 articles comprenant 210 propositions. Il y avait 25 personnes en commission. Il compare ce travail à un match de football. Il y avait les gens de la gauche qui étaient contre les OGM et ceux de la droite qui étaient pour, tandis que lui se situait entre les deux positions. Jean Stéphane Bron a réalisé un film sur ce thème : "Mais im Bundeshuus – Le Génie helvétique". Dans ce débat, chacun campait sur ses décisions sans vouloir écouter l'autre. Jacques Neirynck pense que personne ne voulait comprendre le problème. Cette situation était marquante pour lui qui avait une formation scientifique et la volonté de comprendre.
00:11:58 – 00:13:40 (Séquence 13) : Jacques Neirynck partageait la commission avec d'autres personnes qui ne connaissaient pas le dossier, il n’y avait que trois universitaires : un médecin, Yves Guisan et l'historien Scheurer. Le peuple a des réactions de méfiances par rapport au progrès. Il pense que dans la culture populaire, on n'a jamais intégré le darwinisme : l'évolution. Les gens pensent que la nature est fixe. Le véritable débat de la commission était de savoir s'ils laissaient la nature évoluer au hasard ou s'ils en prenaient les commandes. L'interlocuteur rappelle que le principe d'une démocratie parlementaire est que les élus prennent les décisions, même s'ils n'ont pas de titre universitaire. Jacques Neirynck a découvert la particularité de la démocratie semi-directe suisse dans laquelle le peuple peut casser une décision. Dans cette affaire, le peuple a réitéré à huit reprises un non au Conseil fédéral et au Parlement. Jacques Neirynck se demande dans quelle mesure ce système est stable, car le peuple se prononce en toute méconnaissance des choses. Il cite l'exemple de l'interdiction de construire une animalerie sur le campus qui se trouve en face de chez lui. Il pense que cette décision n'appartenait pas au peuple.
00:13:47 – 00:14:28 (Séquence 14) : Jacques Neirynck a fait son doctorat dans les années 1950 qui ont été marquées par le boum du progrès. Il pense qu’il est prisonnier du mythe du progrès. Il rappelle l'influence de Tintin et souligne l'importance de Jules Vernes dans sa vie d'adulte. Il rappelle qu'au XIXe siècle, on croyait que l'évolution de la technique allait changer le destin des hommes. La seconde moitié du XXe siècle avec Hiroshima et Tchernobyl a montré qu'il y a des inconvénients et des limites à la technique.
00:14:35 – 00:15:19 (Séquence 15) : Lorsque Jacques Neirynck est parti au Congo, il avait en tête le mythe du progrès, mais il a vécu la désillusion de la décolonisation. Il n'était pas possible de transformer d'un seul coup un peuple qui vivait de manière archaïque au XXe siècle. L’environnement s’est détérioré et les progrès techniques n'ont pas rempli les promesses qu'ils avaient faites à l'égard de la population. Celle-ci vit mieux, elle a un plus grand pouvoir d’achat qu’avant. Les progrès ne se manifestent pas toujours dans la consommation concrète.
00:15:27 – 00:16:10 (Séquence 16) : Jacques Neirynck, le professeur, l'ingénieur, le spécialiste d'électricité, lit Jules Vernes et Tintin. On lui demande s'il est un homme de sciences ou un homme de rêves. Il croit que les hommes de sciences sont des hommes de rêves. Il n'a pas effectué beaucoup de découvertes : il dit avoir apporté deux ou trois nouveaux éléments qui ont subitement surgi. Il compare cela au schéma d'Archimède et de son eurêka. Il explique qu'une bonne partie du travail est effectué dans l'inconscient. L'artiste découvre également ce phénomène. Il considère que la composition de la 9e symphonie de Beethoven est un acte intuitif et non rationnel.
00:16:19 – 00:17:05 (Séquence 17) : Jacques Neirynck a écrit de nombreux ouvrages : en passant du traité scientifique à des fictions comme "Le manuscrit du Saint-Sépulcre". On lui demande s'il arrive à vivre les deux réalités sans difficulté. A la manière de l'école du thriller anglo-saxon, il cherche toujours à se documenter quand il écrit un roman. Il cite l'exemple de George Simenon qui lui aussi se documentait avant d'écrire ses livres et qui a mis en scène des choses vécues.
00:17:14 – 00:17:51 (Séquence 18) : Jacques Neirynck a eu envie d'écrire des œuvres de fiction déjà enfant. Il a dicté sa première œuvre romanesque à sa tante Marguerite à la période de Noël 1937. Il dessinait et sa tante écrivait. Quand il était étudiant, il a écrit des œuvres de fictions qu'il a ensuite jetées. Une de celles-ci a été lue par Julien Green qui lui a dit que c'était très bien et qui lui a conseillé de la brûler et de la recommencer.
00:18:01 – 00:19:11 (Séquence 19) : L’interlocuteur convie Jacques Neirynck à expliquer si c'est dans la lecture de Simenon ou d'Hergé, dans l'écriture ou dans l'observation du réel, qu'il se réalise le mieux. Il ne dissocie plus ces trois actes. Il pense qu'un bon romancier est quelqu'un qui met en scène le réel. Il donne l'exemple d'un de ses romans, "Les cendres de Superphenix", qui est autant un roman scientifique qu’un thriller. Dans ce livre, il imagine l'explosion de l'usine Creys-Malville et ses répercussions politiques. Il n'a jamais pensé que certains de ses livres deviendraient des best-sellers. Son premier ouvrage "Le manuscrit du Saint-Sépulcre" a été refusé par 35 éditeurs parisiens avant d'être accepté par les Editions du Cerf. Le livre a finalement été vendu à 50000 exemplaires en France et a été traduit dans quatre langues.
00:19:22 – 00:21:22 (Séquence 20) : Jacques Neirynck se souvient avoir lu son premier livre en mars 1938, six mois après avoir appris à lire. Il a lu intégralement "Les malheurs de Sophie" de la Comtesse de Ségur, il a ensuite découvert Jules Vernes. La lecture était pour lui une manière de s'abstraire de la société. La famille vivait en ville au centre de Bruxelles, il n'avait pas souvent l'occasion de jouer avec des enfants de son âge. Il se souvient s'être souvent ennuyé quand il était petit et avec la lecture il a découvert qu'il ne s'ennuierait plus jamais. A Ecublens, il possède une grande bibliothèque. La lecture est pour lui une sorte de carapace de protection, il s’y réfugie. Pour tous les livres qu'il a achetés, y compris la collection de Jules Vernes, Jacques Neirynck croyait acheter avec l'ouvrage, le temps de les lire. Dans la lecture, on rencontre des gens qui n'existent pas forcément dans la réalité. Il invite parfois des écrivains chez lui.
00:21:33 – 00:22:13 (Séquence 21) : Jacques Neirynck déteste le sport. Il est prêt à travailler dans le jardin pour avoir un résultat positif, mais l'exercice physique sans but ne l'intéresse pas : courir pour n’aller nulle part ; sauter pour finir par retomber ; 22 adultes qui se disputent un ballon. Il estime que le sport s'est dégradé et qu'il est devenu une forme de compétition avec des dérives financières et de drogues. Il est satisfait de ne s'être jamais abandonné au sport.
00:22:25 – 00:22:54 (Séquence 22) : On demande à Jacques Neirynck s'il n'éprouve pas une dualité entre le corps et l'esprit comme elle existe dans la philosophie chrétienne et chez Platon. Il explique qu'il vient de terminer un livre sur le cerveau et qu'il s'est rendu compte qu'il vivait en état de dualisme platonicien. Il imaginait qu'il avait une âme invisible et immatérielle et un corps matériel et visible, mais en écrivant il s'est rendu compte qu'ils forment un ensemble, car son esprit n'existe pas en dehors de son corps.
00:23:07 – 00:24:06 (Séquence 23) : Jacques Neirynck s'est nourri des lectures de Jules Vernes, mais aussi de la littérature russe comme celle de Dostoïevski qu'il a lue vers l'âge de 14 ans. Dans ses dernières années d’études secondaires, il souligne qu'il avait un excellent professeur de littérature qui leur permettait de tout lire. Il a lu les œuvres importantes de cet auteur telles que "Les Frères Karamazov", "Crime et Châtiment" ou "L'Idiot". L’interlocuteur demande à Jacques Neirynck si un adolescent de 14 ans peut appréhender une fresque littéraire comme un adulte. Il ne le pense pas. Il a d’ailleurs relu certains des ouvrages qu'il avait lus. Il s'est rendu compte qu'il était un adolescent naïf. Jacques Neirynck a grandi dans un milieu modeste et la lecture était un moyen d’accéder à des sentiments et des conversations auxquels il n’avait pas accès. A travers la lecture, il cherchait à découvrir sa vie d'adulte.
00:24:19 – 00:26:15 (Séquence 24) : Le premier essai de Jacques Neirynck, le meilleur selon lui, s'intitule "Le huitième jour de la création". Il est le résultat de l'insatisfaction qu'il éprouvait par rapport à son métier de chercheur et de professeur à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Il exerçait parallèlement une activité de consumériste dans les organisations de consommateurs français, belges et à la télévision avec l'émission "A bon entendeur" de Catherine Wahli. Il s'interrogeait sur la technologie : fallait-il l'accepter comme les partis de droite ou la refuser comme les partis écologistes ? Il cherchait à trouver des règles qui permettent de choisir ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. L’interlocuteur demande à Jacques Neirynck si son engagement pour la défense des consommateurs, notamment avec "A bon entendeur", n'était pas une manière de montrer qu'il était aussi accroché à la réalité du quotidien. Il travaillait la journée dans un laboratoire de Philips et, le soir, il se rendait dans une organisation de consommateurs. C'était comme s'il défaisait la nuit ce qu'il confectionnait le jour comme la tapisserie de Pénélope. Il visait le même dessein qu'elle : une technique qui serve réellement l'homme.
00:26:29 – 00:28:25 (Séquence 25) : Jacques Neirynck a été frappé par la littérature du XVIIIe siècle. Ses auteurs préférés sont Rousseau et Voltaire chacun pour un pan de leur activité. Il pense que des choses extraordinaires se sont passées au XVIIIe siècle et que la société actuelle est l’héritière des Lumières. Le XVIIIe siècle est l'aventure de l'Encyclopédie. Jacques Neirynck a coordonné la rédaction de traités comme le "Traité de l'électricité". Il a aussi dirigé les Presses universitaires de Lausanne. L’interlocuteur lui demande s'il a eu l'ambition d'acquérir un savoir global. Le "Traité de l'électricité" n'existait pas dans d'autres pays, il a été traduit dans plusieurs langues. Il souhaitait réunir différents scientifiques pour dégager quelque chose de nouveau. Il a poussé son épouse à écrire un "Guide de la technique" qui traite de l'ensemble des techniques. Le livre se trouve dans sa bibliothèque. Il pense qu'il manque aujourd'hui des encyclopédistes, des gens qui ont une vision globale. Il craint que l'école d'aujourd'hui ne favorise pas cette vision globale. Par son expérience avec ses 5 enfants, il voit dans l'école primaire et secondaire un échec. Il estime qu’il n'y a plus de culture et qu'on n'arrive plus à la transmettre.
00:28:39 – 00:30:39 (Séquence 26) : Jacques Neirynck est un catholique engagé. Il pense qu’être catholique à l'aube du troisième millénaire est une situation difficile, car l'incrédulité et l'incroyance se répandent dans la société occidentale. Il se considère un homme d'un autre siècle. Il a été conditionné par sa famille et par le collège religieux. Au collège et à l'Université de Louvain, il a trouvé une structure de pensée et un sens à sa vie. Il pense qu'un scientifique a toujours besoin de structures et qu’il doit être prêt à en changer si elles ne fonctionnent plus. Il maintient qu’à l'intérieur du catholicisme il est nécessaire également de bouger. Le dogme a évolué, il garde la même formulation verbale, mais son contenu change. Dans son Eglise, il est dérangé par des questions de disciplines ecclésiastiques : les prêtres ne peuvent pas se marier, les femmes ne peuvent pas être ordonnées.
00:30:53 – 00:33:13 (Séquence 27) : L’interlocuteur demande à Jacques Neirynck les raisons pour lesquelles il ne se convertit pas au protestantisme qui autorise le mariage des prêtres et l'ordination des femmes. Il s'est posé cette question lorsqu'il est arrivé dans le canton de Vaud qui était majoritairement protestant. Il pense que la religion relie aux ancêtres et qu'il est bien de rester à l'intérieur de sa tradition. Il y a deux choses que la religion apporte : un sens de la vie et des rites et des coutumes. L'interlocuteur distingue la raison démonstrative très présente chez les protestants et l'instinct rituel du catholicisme. Jacques Neirynck pense qu'il faut tenir les deux à la fois. Il souhaiterait que les cérémonies religieuses restent quelque chose de vivant. Il considère que l'homélie des prêtres et des pasteurs pourrait être meilleure, mais ils doivent s'adresser à un public large qui à une instruction religieuse superficielle et sommaire ? Jacques Neirynck a suivi au collège trois heures hebdomadaires d'instruction religieuse. A l'Université de Louvain, il a eu contact avec les théologiens qui sont devenus les experts de Vatican II.
00:33:28 – 00:34:30 (Séquence 28) : Au début des années 1960, Jacques Neirynck a une trentaine d'années, lorsque Jean XXIII puis Paul VI convoquent le Concile de Vatican II. On lui demande comment, en tant que catholique, il a vécu cette révolution. Il a perçu ce changement positivement, certaines lourdeurs ont été abandonnées comme le service en latin. Il ne le regrette pas. Il souligne qu'il a aimé le grec, mais a détesté le latin, non pour sa structure, mais pour la médiocrité de la littérature qui est orientée vers le droit et l'armée. Il pense que les changements auraient dû aller plus loin : décentralisation et élection des évêques par le peuple, mariage des prêtres, ordination des femmes. Tout le processus de changement a été bloqué en 1968. Jacques Neirynck a été déçu de la publication de l'encyclique "Humanæ vitæ" par Paul VI condamnant la contraception.
00:34:45 – 00:35:23 (Séquence 29) : L'interlocuteur demande à Jacques Neirynck s'il a apprécié le pape qui a suivi Paul VI, Jean-Paul II. Il estime qu'il n'y a pas de pape parfait et que la société vit dans l'imperfection. Ce pape était un personnage extraordinaire, un comédien. Avec Walesa et d'autres personnes, il a ébranlé le communisme. Pour Jacques Neirynck, Jean-Paul II est le pape qui a abattu le marxisme.
00:35:39 – 00:36:41 (Séquence 30) : Jacques Neirynck se rapproche du modèle protestant. Certaines personnes du clergé catholique lui ont reproché sa position. Il n'est pas blessé par ces réactions. A la suite de la publication de son livre, "Le manuscrit de Saint-Sépulcre", il a reçu de nombreux compliments et critiques. Un pasteur genevois a dit qu'il ne comprenait pas pourquoi il y avait tant de récits de repas. Il a aussi reçu les reproches de Monseigneur Mamie, parce qu'il parlait du frère de Jésus. Jacques Neirynck pense que cet homme était conditionné par la fonction qu'il remplissait et la tâche de recrutement d'un clergé de célibataire masculin.
00:36:58 – 00:37:38 (Séquence 31) : L'interlocuteur demande à Jacques Neirynck son avis sur la première année du pape Benoît XVI. Il a eu l'occasion de le voir, car ils l'ont invité au centre catholique d'études à Lausanne. Il l’a rencontré à l’occasion d’une soirée et a trouvé qu’il était une personne assez exceptionnelle. Il était capable de faire un exposé d'une heure en français sans notes. Jacques Neirynck a confiance dans les personnes intelligentes. Ce pape a réussi à liquider l'organisation : Légionnaires du Christ. Il pense que c'est un pape qui marquera son époque.
00:37:55 – 00:39:36 (Séquence 32) : Le monde du goût est une des passions de Jacques Neirynck. Il a été conditionné par sa famille. Son grand-père paternel était pâtissier, son père était confiseur. Il a bénéficié dans son enfance d'une excellente cuisine. Il est devenu adepte de la bonne cuisine, c'est pour lui une philosophie. Il pense qu'il n'aurait pas pu devenir moine, car la nourriture dans les couvents est de mauvaise qualité. Il estime que c'est une faille théologique et que si la nature donne de bons produits, il faut bien les traiter. Jacques Neirynck pense que le corps est le lieu où réside l'esprit et ce n'est pas en se privant qu'on va améliorer l'esprit. La majorité des religions ou des philosophies plaident pour l'ascèse. Il est opposé à une ascèse qui porte sur la nourriture, le logement, les vêtements. Il pense qu'il faut bien vivre. Il ne voit pas un acte du jugement dernier qui viendrait reprocher les actes de gourmandises. Il maintient que la gourmandise n'est pas un péché capital, mais une nécessité. Il essaie de bien cuisiner.
00:39:53 – 00:40:30 (Séquence 33) : Jacques Neirynck n'a pas aimé le scoutisme qu'il a pratiqué en Belgique. Il reprochait au camp le fait qu'il n'y ait pas de fauteuils, pas d'eau chaude. Il aime prendre un bain chaque matin. C'était pour lui une existence de bohème qu'il réprouvait. Au scoutisme, il s'est intéressé uniquement à la cuisine et au feu de camp et le reste l'exaspérait.
00:40:48 – 00:41:23 (Séquence 34) : Jacques Neirynck qui est à la retraite a une autre passion : le théâtre. Il a toujours aimé cet art. Dès qu'il en a l'occasion, par exemple lorsqu'il voyage à Londres, New York ou Paris, il consacre ses soirées au théâtre. Il estime qu'il y a un lien entre le théâtre et le repas : les deux sont une liturgie. C'est un acte par lequel on essaie de donner un sens à la vie. On n’assiste pas au théâtre ni on ne dîne seul, car c'est un acte communautaire.
00:41:41 – 00:43:01 (Séquence 35) : On demande à Jacques Neyrinck s'il n'est pas une forme de "Dom Juan ou le Festin de pierre" de Molière. Jacques Neirynck considère qu'être comédien, professeur ou politicien, c'est chercher à séduire son auditoire et à le capter. Il a enseigné pendant environ 40 ans. Il réussissait à capter et à maintenir l'attention de son auditoire avec une chaire d'électricité à l'EPFL. Il se compare à Jean-Paul II qui captivait les gens avec la théologie. Il était possible d'intéresser l'auditoire en montrant ce qui est dérisoire ou absurde dans la science. Il a essayé de tourner ses cours en comédie.
00:43:19 – 00:44:52 (Séquence 36) : L'interlocuteur souligne qu'avec toutes ses activités, Jacques Neirynck semblait avoir eu une triple vie. Il y a quelques années, il souffrait d'une réelle boulimie à table. Il s'en est guéri. Il désire tout essayé. En cuisine, il a découvert la cuisine libanaise, italienne, grecque ou scandinave. Il souhaite vivre pleinement. L'interlocuteur précise qu'on se trouve dans un monde sectorialisé, spécialisé et demande à Jacques Neirynck comment il est possible de changer cette situation. Jacques Neirynck pense qu'il faut retrouver le sens fondamental donné à l'existence de chaque homme. Le temps qu'il lui reste doit être bien utilisé : il ne va pas faire du jogging ou regarder un match du football, il travaille continuellement dans le jardin, à la cuisine ou à la machine à écrire.
00:45:11 – 00:46:19 (Séquence 37) : Si Jacques Neirynck devait refaire sa vie, il deviendrait écrivain dès le début. Il a pris conscience tardivement que sa véritable vocation était d'écrire. Il l'avait pensé quand il était étudiant, mais son père lui avait expliqué qu'on ne pouvait pas vivre de l'écriture ni du journalisme comme Tintin, mais qu'il fallait faire quelque chose de raisonnable. Il ne regrette pas d'être devenu ingénieur. Il pense que la rigueur de la mathématique impose une rigueur dans l'écriture. Le livre "Pont de la rivière Kwaï" est une sorte de démonstration mathématique écrit par un ingénieur. Il pense que la littérature inspirée par la mathématique est intéressante.
00:46:38 – 00:47:02 (Séquence 38) : Jacques Neirynck a évoqué Rousseau. L’interlocuteur lui demande s'il serait l'homme du "Contrat social", le politicien, celui des "Rêveries", le scientifique et le poète ou l'homme des "Confessions", le livre qui resterait à écrire. Jacques Neirynck a été frappé par l'homme des Confessions aussi par le fait que l'histoire se déroule dans le bassin lémanique dont il est tombé amoureux et où il croit qu'il terminera sa vie.
00:47:21 – 00:47:41 (Séquence 39) : Générique de fin du Plans-Fixes consacré à Jacques Neirynck, professeur, écrivain et homme politique, et tourné à Ecublens le 28 août 2006.
Lien aux découpage sur la base de données original
Questo documento è stato salvaguardato con il sostegno di Memoriav.
304 Documenti in collezione
Commenti